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20 février 2017

Insiang (1976) de Lino Brocka

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Voilà un film philippin vintage qui nous emmène dans les tréfonds de cette capitale grouillante où la promiscuité fait des ravages : il est question d'une relation triangulaire on ne peut plus trouble (la mère, son amant et la fille d'icelle) ; si on apprécie l'aspect éminemment réaliste de la chose, on fait un peu plus la fine bouche devant un dernier quart d'heure qui flirte avec le "mélodrame mélodramatique" (tendance "soap" pour être caustique). Il n'en demeure pas moins, malgré ces petites réserves finales, que le portrait de cette jeune fille "livrée à la pauvreté et à la concupiscence" force le respect.

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Insiang est une bien jolie jeune fille qui n'est pas du genre à minauder. Abandonnée par son père, elle occupe un petit boulot de lavandière et flirte avec un chtit mécano à la coiffure à la Jackson five (les cinq ensemble) ; l'ambiance à la casa est le premier point noir de l'histoire : Insiang doit subir les constantes réflexions de sa marâtre de mère qui ne peut supporter de vivre avec les autres membres de cette famille nombreuse ; elle saute sur la première occasion pour virer comme une malpropre tous ses neveux un peu branleurs et se met dans la foulée avec un jeune gigolo du coin - un boucher monté comme un âne qui joue les petits caïds. Ce dernier, salopiot sous tous rapports, espère à la fois profiter du pognon de la mama et sauter sur la jeunette. Ce sera rapidement chose faite. Insiang, aux abois, fait appel à son gentil mécano pour qu'il la tire de ce mauvais pas. Il l'invite à l'hôtel, la tire, se tire. Insiang n'a plus qu'à revenir, la honte entre les jambes, chez elle ; la bougresse est toutefois bien décidée à se venger. Ce qui surprend au bout du compte, c'est de voir à quel point aucun des personnages n'est vraiment aimable ; si notre sympathie va forcément automatiquement vers Insiang, on se rend compte que cette dernière, après avoir touché le fond, fait montre d'un talent de manipulatrice peu ragoûtant. Le philippin est un loup pour le philippin ? Eh bien jouons à la louve...

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Brocka se sort avec honneur de ces conditions de tournage que l'on imagine pas simples. Il parvient à nous immerger totalement dans ces intérieurs où les toilettes font partie intégrante de la cuisine (espace réduit s'il en est) tout comme il nous plonge dans ces ruelles étroites avec ce petit monde de commerçants, de glandeurs, de petits caïds. Insiang est sous le feu de l'attention des mâles (trois hommes n'ont d'yeux que pour elle : son mécano dilettante, le frère de son amie timide comme tout et son "beau-père" dominateur et violent) et l'on sent bien qu'elle aura bien du mal à sortir indemne de cette aventure ; viol, trahison, indifférence, rumeurs du quartier, la pauvre est victime de toutes les vicissitudes de cette chienne de vie et se retrouve à errer dans cette foule sans aucun but. Elle revient chez elle avec une véritable carapace et décide de tirer parti de ses atouts. C'est glauque comme tout et il est un peu dommage que Brocka se sente envie d'en rajouter (scènes chocs sur une musique stridente poussée à fond - un peu de modération sur la fin ou de finesse dans l'ellipse n'aurait pas fait de mal) : le film demeure, en dehors de ces excès, une vraie réussite tant il parvient à nous faire ressentir toutes les vibrations de cette ville, une ville dont on ne peut parvenir à s'extirper en gardant sa pureté. Insiang : inside Manilla.

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