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24 août 2016

LIVRE : Station Eleven de Emily St. John Mandel - 2014

9782743637552,0-3351325Dans la famille "romans post-apocalyptiques", donnez-moi la fille la plus sensible sans doute, même si son bouquin n'est pas le plus réussi. La belle envoie du bois dans le premier chapitre : un comédien s'effondre brutalement en plein milieu d'une représentation de Shakespeare dans un grand théâtre de Montreal ; inquiétude, consternation, etc. Dernière phrase : "De tous ceux présents ce soir-là, ce fut le barman qui survécut le plus longtemps. Il mourut trois semaines plus tard, sur la route, en quittant la ville." On se frotte les mains devant l'efficacité de ces premières pages, en constatant au passage le talent pour planter des atmosphères crédibles et envoûtantes, et la beauté des personnages. La belle sait écrire, pas de doute, et la jolie traduction lui rend justice. On suit après cette tonique introduction la vie d'une troupe de théâtre itinérante qui traverse le pays après une pandémie qui a tué l'essentiel de la population, dernier bastion de culture et de beauté au milieu de l'horreur qui a frappé la civilisation. Là aussi, on aime cette atmosphère délétère et douce à la fois, on plonge dans ces ambiances à la Angelopoulos mâtiné de film fantastiques avec plaisir. Le livre sait amener du suspense quand il le faut, prendre son temps si nécessaire, et cette partie post-traumatique est intéressante. St John Mandel travaille sur le thème de la disparition, l'art dramatique, aussi absurde sa pratique soit-elle, apparaissant comme la dernière trace de la civilisation, alors que tout s'effondre, que les survivants se renferment dans des micro-communautés sur-protégées, que des pratiques sectaires naissent au milieu des cendres, et qu'il faut être armé jusqu'aux dents pour traverser un territoire redevenu sauvage.

C'est dans la construction que le bouquin peine à trouver ses marques. La belle tente de dresser des ponts subtils, purement sentimentaux, entre le passé (juste avant la catastrophe) et le présent, notamment à travers la vie de ce célèbre comédien mort au début du livre. On rencontre ses épouses, son ami, et cette petite fille qui jouait avec lui et qui est devenue aujourd'hui une comédienne du théâtre ambulant. On découvre ceux qui sont morts, ceux qui ont survécu, dans un élan qui se voudrait élégiaque, dans une réflexion sur les liens qui unissent présent et passé, sur la disparition et sur le sens de la civilisation. Mais pas assez profond, trop préoccupé par l'efficacité, trop hésitant entre roman d'aventures, roman d'anticipation et roman sentimental, le livre ne raconte finalement pas grand chose. Il dresse quelques beaux portraits, trouve parfois une émotion troublante ; mais il manque de profondeur, tout simplement, et on a du mal à voir l'intérêt réel à jongler ainsi entre les deux temps. Ces passerelles se voudraient parlantes et pleines de sens, mais on ne fait que traverser trop rapidement quelques existences qui s'éteignent, sans que ça atteigne vraiment la puissance visée. L'écriture frôle parfois le truc, la roublardise, la grosse ficelle pour attraper le chaland, avec ces effets répétitifs pour fabriquer des cliffhangers un peu facile, ou ce sur-sentimentalisme dont l'auteur abuse. Ça reste un livre assez touchant, parfois vraiment émouvant (les pages sur le musée de la civilisation, sur la fin, très belles), mais qui ne justifie pas la réputation de chef-d'oeuvre qui le précède.

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