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21 juillet 2016

Le Monde de Dory (Finding Dory) d'Andrew Stanton - 2016

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Voilà un film qui avait tout pour me plaire : la suite de Finding Nemo, le joli classique de Pixar, réalisé par le gars qui a fait Wall-E, l'un des plus audacieux cartoons qu'il m'ait été donné de voir. Finding Dory s'intéresse de plus à l'un des personnages les plus forts et profonds du premier opus : un poisson dont la mémoire s'efface immédiatement, qui représente donc à la fois le poisson d'aquarium dans toute sa plénitude (et toutes ses angoisses), et le cinéma lui-même si on veut faire son critique des Cahiers : une image chasse l'autre, un film chasse l'autre, et tout ça finit par faire un monde cohérent, plein de flashs et de réminiscences. Le scénario travaille d'ailleurs joliment là-dessus : Dory a perdu ses parents, et comme elle oublie tout, elle est incapable de les retrouver. Perdue au milieu du grand océan, univers sans contours parfaitement illustratif de son monde intérieur, elle erre comme une âme en peine, orpheline parfois traversée par des images subliminales de son passé, fulgurantes, proustiennes (une odeur, un son, un mot, et c'est parti pour un flash-back). Aidée de ses compagnons (le retour de Nemo et de son père), elle va partir à la recherche de ses origines.

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Voilà une trame psychanalytique rêvée, qui épouse à la fois les cauchemars de l'enfance (l'abandon) et des motifs plus adultes (la traque du passé), des tendances légères (les joies de l'apesanteur) et des tendances sombres (le saut dans le vide). C'est la politique actuelle de Pixar : travailler sur un matériau plus abstrait, plus cérébral, tout en continuant à fabriquer du spectacle bon enfant. On s'installe confortablement, on chausse ses lunettes 3D à la con, et on attend la magie... Elle ne viendra pas : dès les premières images, on voit le naufrage advenir. La scène d'ouverture, d'une mièvrerie à faire bander Walt Disney, est très laide, mal rythmée, bête à manger du foin. En trois minutes, elle gâche tout ce qui faisait la beauté de Nemo : le point de vue d'un enfant confronté à la perte. Là, c'est juste un bébé poisson qui pleurniche devant des parents énamourés (et doublés franchement au plus pressé) ; aucune tension, aucune angoisse, rien que de la guimauve calibrée et normative qui sera le fil conducteur de l'ensemble du film. Car une fois ce flash-back terminé, on voit bien que tout le reste est sur la même tonalité. Mercantile et roublard, le film piétine allègrement son scénario, en fait un bête robinet à aventures, et aligne les personnages secondaires laids et sans profondeur, uniquement pour plaire aux gosses et leur faire acheter des produits dérivés : un beluga très moche mais doublé par Kev Adams (bankable, ça, mon gars), une baleine antipathique (Mathilde Seigner, même en baleine, elle est nullarde), un poulpe stéréotypé déjà vu mille fois dans tous les cartoons récents. Hystérique, le film ne s'attache qu'aux évènements, ne prend jamais le temps de faire sentir les angoisses, les espoirs de Dory. Par ailleurs, elle aussi est gavante : trop bavarde, mal aimée par le réalisateur, elle vous pète les glaouis très rapidement. On reste dans la surenchère, assez mal mise en scène d'ailleurs (difficile de faire passer des concepts scientifiques assez complexes, comme le sonar, en images), jusqu'à un final en roue libre fatigant de bruit et de fureur.

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Ça aurait pu être un beau film secret pour les adultes, mais Stanton drague outrancièrement les enfants avec ses personnages mièvres et ses aventures convenues. La majeure partie se déroule dans une sorte de paradis pour les mômes, un gigantesque aquarium moderne qui doit représenter l'archétype du bonheur, ce qui en dit long sur la vision marchande du monde des créateurs de Dory. Ça sentait les gros sous depuis le début, on imagine la billetterie des aquariums chauffer au rouge et la vente de porte-clés "Bonjour je m'appelle Dory et je suis ton amie" exploser. Tout ça grâce à ce produit même pas très beau (la 3D est peu exploitée, l'ensemble est curieusement sous-exposé, le monde paradisiaque des lagons est très clicheteux) et en tout cas très putassier et ennuyeux. Mal de mer.

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