La Maîtresse du Lieutenant français (The French Lieutenant’s Woman) (1981) de Karel Reisz
Je gardais un excellent souvenir de cette œuvre de Reisz, un souvenir un peu daté. Si Mery Streep était en 1981 franchement éblouissante (cela donne presque envie de revoir Le Choix de Sophie… et de le relire aussi, d’ailleurs, mais là on n’arrête jamais) et Jeremy Irons… ironesque (toujours ce même regard immobile et vide quel que soit le rôle : la première fois, ça impressionne, aujourd’hui on s’est un peu lassé), le film a quand même pris un peu de plomb dans l’aile. Oh c’est assez malin ce petit côté mêlant film (d’époque) et tournage de film (moderne) mais j’en gardais un souvenir beaucoup plus tortueux et alambiqué. En fait, c’est simple comme bonjour et même un peu simpliste. Irons rompt ses fiançailles (film) et commet l’adultère (tournage) pour Streep et l’issue paraît dans les deux cas pas gagnée d’avance. Pas gagnée d’avance, certes, mais on ne peut pas dire, à la revoyure, qu’on ira de surprise en surprise – c’est finalement, tout ça, tout ça, gentiment prévisible.
On peut tout de même encore apprécier au passage un petit dialogue quasi méta-filmique (« il y a dans le roman deux fins, une heureuse et une malheureuse : laquelle sera choisie ? demande, curieux le mari de Meryl » « La première, ou non la deuxième… demandez à Sarah, répond un Irons malicieux – bien vu) ou les allusions, dans « la vraie vie », à un épisode du film déjà tourné (Irons qui gronde Meryl d’être partie d’Exeter, eheh), on peut sourire à la présence multiple de pommes (pêchés à l’horizon, se dit-on) ou à la séquence, « dans le film dans le film », où Irons, après avoir embrassé Meryl, retrouve sa future fiancée qui tire à l’arc (le cœur d’Irons est traversé (avec le jeu des perspective) par la flèche… mais il est bien amoureux de Meryl (un brin cupide ? Un petit peu intrigante surtout) et non de cette fiancée (cupidone malgré elle ? Surtout très vexée). Au-delà de ces divers petits aspects, on peut ajouter la joliesse de la reconstitution historique, une mise en scène d’une belle sobriété (…) mais au final, avouons-le, il n’y a ici rien de vraiment ultra frémissant. Les souvenirs embellissent souvent la valeur et la complexité d’un film… Un Reisz (sur un thème que j’adore) qui me paraît aujourd’hui bien sage et un peu trop propret. Reste la rousseur et la prunelle pétillante de Streep qui n’ont point perdu de leur « impact » – c’est déjà pas mal.