Kingsman : Services secrets (Kingsman : The Secret Service) de Matthew Vaughn - 2015
Oui alors on sait très bien que quand on envoie un film comme Kingsman, on ne va pas tomber sur un hommage à Rohmer, n'est-ce pas, plaçons-nous donc dans la catégorie "divertissement" de ce blog. Cé fun et sa vide la tete, comme diraient les jeunes, ce qui est déjà pas si mal, même si on eût aimé que cela nous emmenât aussi vers d'autres lectures plus fines. Non, Vaughn n'est pas de ce bord-là, son seul souci est de vous faire marrer pendant deux heures, et il y arrive de temps en temps, c'est vrai. Le gars voudrait être une sorte de tarantino du film d'espionnage, et nous sert donc un mélange entre parodie et hommage au genre, sous la forme d'un produit vintage joliment travaillé. Michael Caine pour le cachet "old school", Colin Firth et son pébroque pour le côté "Scotland Yard chez les punks", Samuel Jackson pour faire du pied à Quentin, et le jeune Taron Egerton pour séduire les adolescentes, c'est calibré au millimètre. Le scénario s'amuse des codes des James Bond et mélange relativement habilement le cinéma classique et le kung-fu, le film d'action façon Don Siegel et la violence moderne.
C'est franchement assez réussi des deux côtés : les tenants des motifs à l'ancienne aimeront le jeu délicieux de Firth, les gadgets à la con et le scénario à base de fin du monde programmée ; ceux qui préfèrent les films bourrins apprécieront les scènes de bagarre hyper-spectaculaires (des sortes de condensation de temps et de lieux, à la limite du cartoon, et sans arrêt inventives) ; ceux qui cherchent un méta-langage devront se contenter de cette timide relecture des codes, qui ne raconte rien du tout sur la nature du film d'espionnage mais s'en amuse façon collégien. Le souci, c'est l'esthétique du film, une succession d'écrans verts très très moches : les effets spéciaux, les décors, les trucages, sont affreux, alors que le film en est saturé. Les personnages, simples ombres représentant chacun d'eux une catégorie à lui seul (la méchante, une fille aux prothèses en forme de sabre ; Jackson, qui zézaye comme un malade pour fabriquer un Dr. No crédible ; les candidats espions fils à papa), finissent par n'être que des pantins, et c'est dommage. Mais allez, les acteurs s'amusent, nous aussi, ne crachons pas dans la soupe.