On vous parle (1969-1973) de Chris Marker
On vous parle du Brésil : tortures (1969)
Suite à l'enlèvement de l'ambassadeur américain au Brésil par des opposants au gouvernement militaire en place, 15 militants révolutionnaires ont pu être libérés en échange du ponte ricain. Ceux-là évoquent les tortures qu'ils ont dû subir au cours des quelques mois qu'a duré leur incarcération. Suspension à une barre, charges électriques aux testicules ou à la langue, coups aux reins, au foie, au visage... ces tortures furent systématiques, chaque militant, quelle que soit sa région, devant y passer. Tortures physiques terribles mais aussi tortures psychologiques tout aussi affreuses : des proches qui n'avaient rien à voir avec les activités des militants furent à leur tour torturés sous les yeux de ces derniers. Aucune limite semble-t-il à l'abjection humaine. Marker filme sobrement ses témoignages, captant notamment au passage le regard fixe d'une ex-prisonnière perdue dans ses pensées, revivant semble-t-il son propre calvaire alors même que ses camarades parlent des sévices subis. Comme le dit la voix off, on ne pourra pas dire que l'on ne savait pas, Marker éternel cinéaste des injustices et de la mémoire.
On vous parle du Brésil : Carlos Marighela (1970)
Ancien miltant communiste, Marighela participa à l'ALN (l'Action de Libération Nationale) pour passer des mots à l'action. Organisant des groupuscules armés contre la dictature des généraux - pour piller des banques, kidnapper des policiers -, Marighela incarne l'exemple même du résistant actif. Se vouant corps et âme au combat, l'homme tomba sous les balles lors d'une embsucade menée par 80 policiers. Mais cette figure brésilienne digne d'un Che sut faire des petits au sein de la masse populaire alors même que le pouvoir en place se durcissait (arrestations systématiques, tortures...). Un homme décrit par l'un de ses proches - interrogé sous couvert de l'anonymat - comme quelqu'un de rigoureux, d'efficace, de déterminé. Un homme de terrain, un Carlos se battant pour des idéaux qui avaient un sens, un but. Marker filme le témoin dans un poste de télé, comme s'il souhaitait que les programmes télévisuels français se fassent un peu plus le relais de ce genre d'information.
On vous parle du Chili : ce que disait Allende (1973) avec Miguel Littin
Marker monte différents extraits d'une interview d'Allende faite par Régis Debray et filmée par Miguel Littin. Il y est question de la politique que souhaite mettre en place Allende en faveur du prolétariat (nationalisation, centralisation, réformes agraires, autonomie économique, anti-impérialisme...) mais également des menaces qui pèsent sur lui (de l'extérieur, nos amis américains, ou de l'intérieur). Allende, bien que conscient du danger sur sa personne, n'a pas l'air de trop s'en formaliser, déjà bien décidé à prendre les rênes du pouvoir et à mettre en place ce pour quoi il a été élu, pour les gens qui l'ont élu (oui, ce n'est pas forcément utopique...). Une discussion à bâton rompu entre un militant marxiste et un homme de gauche qui a pris le pouvoir le plus démocratiquement du monde. Un homme avec une vision pour son pays, son peuple. Puis, il y eut la crise et Pinochet pinocha...
Marker - rien à jeter : ici