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12 février 2014

La Bête aveugle (Môjû) (1969) de Yasuzô Masumara

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Il y a vraiment des choses très intéressantes dans ce film de Masumura qui s'ouvre comme une ode à la beauté du corps féminin, à l'art de la sculpture, au plaisir esthétique et sensoriel donc en un sens, et qui s'achève dans la recherche de plaisirs extrêmes (un genre d'empire des sens sado-nippon s'il fallait trouver une formule), dans la destruction, l'auto-destruction, l'horreur brute. Vaste programme.

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La première partie de l'œuvre nous offre un kidnapping « classique » (un sculpteur aveugle jette son dévolu sur un modèle dont il a pu tâter la silhouette sculptée lors d'une exposition) dans un lieu qui l'est beaucoup moins : deux silhouettes féminines géantes trônent au milieu d'un atelier dont les murs sont couverts de... membres (jambes, bras...) et diverses parties du corps (nez, oreilles, yeux, seins...). Il y a déjà quelque chose de macabre dans ce gigantesque atelier de ce créateur fou qui vit encore avec sa mère... La donzelle hallucine pendant que notre ami aveugle lui fait un cours sur les cinq sens. Chaque partie du décor que l'on découvre est un vrai régal en soi, et plus notre artiste dévoile ses concepts, sa philosophie d’aveugle éclairé, plus la pauvre fille est affolée... Le petit mannequin qui faisait des photos de nus est pris dans les rets d'un grand malade qui lui voue déjà un culte. Il veut faire de son corps un chef-d’œuvre absolu, un objet artistique ultime pour le plaisir des sens, ou plutôt pour le plaisir d'un sens en particulier, le toucher. Il la cherche, la poursuit, elle s'échappe, tente de feinter pour rentrer dans ses bonnes grâces, d’amadouer son tortionnaire pour mieux le tromper - classique mais en vain... La donzelle devra trouver un autre stratagème : elle est maline comme tout dans la façon d'user de son corps, de ses charmes, de son sex-appeal, pas de souci de ce point de vue-là ; le problème, toutefois, lorsque l'on décide de mettre un pied dans l'empire des sens c'est que, comme pour tous les empires, il est parfois difficile d'en sortir...

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La donzelle va jouer la carte de la dissension familiale, une thématique toute asiatique ; son calcul savant est le suivant : séduire le fils à sa maman, l'initier aux plaisirs amoureux pour rendre jaloux sa môman, véritable chienne de garde des lieux, prête à tout pour que son fils aveugle puisse assouvir sa passion : la sculpture. Le fiston va passer d'une passion l'autre, totalement ensorcelé physiquement par notre amie ; cela aura l'effet escompté sur la mère : la modèle lui vole son bébé, il est grand temps de se débarrasser de ce démon. S'en suit une crise aiguë au sein de la famille, une crise violente, tragique... La donzelle a tout fait pour ne plus être l'esclave de cet artiste, de cette famille de fou-furieux, le problème c'est que chemin faisant, alors que son tortionnaire, sous l'emprise de la colère, a usé et abusé de son corps, elle est devenue l'esclave de plaisirs (extrêmes) charnels. Qui cherche trouve disait ma grand-mère. Fallait pas jouer avec le feu...

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On entre dans l'ultime partie de cette œuvre maligne et sombre, dans ce qu'on pourrait appeler l'enfer des sens. Nos deux amants vont vouloir goûter aux sensations les plus ultimes (le « modèle » semblant prendre les rênes), mêlant dans un ballet purement sadique douleurs et jouissances. On se teste avec de simples morsures, on glisse gentiment (sobre panoramique sur des objets tranchants et effrayants...) dans le délire vampirique de blessures sucées, avant de se laisser tenter par la mutilation... On joue, on s'amuse et puis on dérape, c'est toujours le problème chez nos amis nippons... De la beauté de l'art à l'art de la mort (toujours réussir sa sortie...) il n'y a qu'un pas que Masumura n'hésitera pas à franchir, bouclant malicieusement la boucle en flirtant avec le fantastique : comme chez toute Vénus qui se respecte, la statue verra ses bras tomber. Masumura, comme le sculpteur l'a fait de sa créature, nous a pris gentiment par la main avant de nous emmener aux confins de l'horreur. Bien joué de sa part et de celle de son (excellent) trio de comédiens qui nous ont pris en otage dans cette expérience esthético-sensuello-familio-horrifique. Une plongée dans les ténèbres de l'autodestruction « sensorielle » nipponne. Magnifiquement et sensuellement terrifiant.    

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