LIVRE : La Vérité sur Marie de Jean-Philippe Toussaint - 2009
Roman en trois parties de l'ami Toussaint dont la première partie en particulier captive : Toussaint nous conte... l'arrêt cardiaque de l'amant de Marie et nous livre quelques phrases - toujours à rallonge - absolument virtuoses ; le rythme est véritablement trépidant dans cette ouverture qui commence par des échanges amoureux entre Marie et cet homme et se termine par des échanges amoureux entre Marie... et le narrateur venu à la rescousse d'une Marie désemparée. Entre-temps, les secours tenteront l'impossible pour ranimer l'homme... Comme le symbole d'un (autre) amour impossible à sauver... Hum, hum... Sinon, en saura-t-on vraiment plus sur Marie ? Quelques adjectifs glissés ici ou là pour décrire une femme libre, un peu bordélique, sensuelle... mais reconnaissons que Toussaint n'est guère disert sur son héroïne : dans la seconde partie, il se concentre sur le récit échevelé d'un cheval qui file dans la nuit semant la panique à l'aéroport de Tokyo, et dans la dernière sur un incendie à l'île d'Elbe qui va détruire des écuries et laisser le cheval de Marie blessé... On ne peut s'empêcher de voir dans cette métaphore chevaline filée, plus que le portrait de l'héroïne, le portrait d'un amour. Celui entre Marie et le narrateur qui s'est perdu, qui s'est épuisé, qui s'est blessé. C'est d'ailleurs ce même sentiment de tristesse qui apert dans la dernière partie avec ce décor qui part en fumée, ce cheval sauvé des cendres mais condamné. Si les corps du narrateur et de Marie, dans cette ultime partie, ne cessent de s'effleurer sans se rejoindre, c'est sans doute parce cette partie n'est finalement qu'un fantasme qui n'existe que dans l'esprit du narrateur. Dormant au rez-de-chaussée alors que Marie est à l'étage dans la demeure de ce père décédé un an plus tôt, le narrateur va jusqu'à rêver les rêves de celle qu'il a aimée, qu'il aimera toujours... Il se dégage de leur relation (imaginaire... sans doute) un sentiment d'apaisement, de calme, mais la fuite suicidaire de ce cheval à l'aéroport et la blessure mortelle de cet autre dans le haras ne trompent guère : cette relation semble avoir vécu ses derniers feux, s'être consumée... On prend toujours autant de plaisir à lire ces phrases d'une précision d'horloger dans les descriptions, des phrases magnifiquement découpées, construites, dont on ne perd jamais le fil, et dont la longueur finit souvent par laisser le lecteur à bout de souffle. J'espère prendre autant de plaisir à me lover dans Nue.