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18 mai 2013

Magic Mike de Steven Soderbergh - 2012

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Je vous vois esquisser un ricanement en découvrant que je viens de me taper un film sur les Chippendales. Eh ben oui, et je dirai même plus : c'est une très agréable surprise de découvrir Soderbergh sur ces chemins-là. Sans hurler au génie, je serais même à deux doigts de classer Magic Mike dans les très bons Soderbergh, en tout cas dans sa veine la plus commerciale. Derrière l'entertainement pur jus, derrière les dorures et le fun, derrière le scénario cousu de fil blanc, on entend la petite voix du metteur en scène nous crier quelque chose de très personnel, si bien qu'on comprend qu'on a affaire là à un film à tiroirs, qui se cache derrière le commercial pour dire quelque chose de touchant de son auteur.

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On regarde donc l'ascension d'un petit mec anonyme qui, au contact d'un pro, va découvrir le monde interlope et clinquant du strip-tease masculin : fric, drogue, filles, succès et cocktails sur des plages paradisiaques, bref la vie de Shang mais avec des abdos. Rien de bien novateur dans le scénario, toutes les étapes y sont, des débuts tatonnants à la déchéance, des coups bas aux moments de gloire, des engueulades avec le producteur aux discussions familiales houleuses. L'essentiel du film, et c'est la première qualité, est consacré à ces chorégraphies improbables où des gars taillés comme des bûcherons se livrent à de très suggestives variantes sur le métier de policiers, de militaires ou de chefs de chantier. Les danses, hyper bien montées par un Soderbergh vraiment virtuose du rythme, sont très drôles : non seulement les gusses sont excellents (Channing Tatum est vraiment impressionnant), mais en plus les chorégraphies elles-mêmes manient un second degré bon enfant qui fait mouche. Le film renverse les traditionnelles représentations de l'érotisme féminin, en nous montrant ces solides gaillards en tant que cibles de donzelles hurlantes. Ca balance de l'hormone par poignées, ça pousse du cri hystérique, ça joue du bassin et du membre contondant avec un vrai sens du spectacle, et Soderbergh enregistre tout ça avec une énergie, un fun, un humour communicatifs. Pour cette fois, les dorures clinquantes de sa mise en scène, les décors lisses et propres, les lumières dorées et clicheteuses, servent le sujet : il y est question d'apparence et de superficialité, les personnages sont avant tout de la chair à spectacle.

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Et c'est là qu'on commence à entrevoir la nécessité du film : véritable autoportrait, le film nous montre l'artiste qu'est Soderbergh condamné à la rentabilité, au spectacle, à l'entertainment. On voit très souvent dans ces personnages de mannequins des êtres malheureux, convaincu qu'ils sont bons à autre chose mais dévoués tout de même au pur divertissement. Pour le réalisateur de films aussi différents que Ocean's Eleven, Full Frontal ou Solaris, ça fait sens indéniablement : ce film est une sorte de confession intime du gars, qui dit son désarroi de faire partie du jeu hollywoodien tout en étant attiré vers l'expérimental et le contemporain. Il y a dans cettte foule braillante de filles un portrait assez amer du public de cinéma, dans ce chef de troupe égotiste (excellent Matthew McConaughey) un constat acide sur les exigences des producteurs, et dans la mélancolie étrange de Tatum un sentiment touchant de la part de Soderbergh. Le film est dix fois trop long, attendu la plupart du temps, clicheteux à plein d'endroits (le personnage de la nana), mais ce petit secret enfermé en son sein vaut le détour.

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