Headhunters (Hodejegerne) de Morten Tyldum - 2011
Ô suprématie de la littérature sur le cinéma, dirais-je emphatiquement pour commencer. Morten Tyldum adapte ici l'excellent thriller de Jo Nesbø, et le moins qu'on puisse dire est qu'il produit une version light de la chose. Tous les excès du roman sont ici lissés au profit d'une ambiance tout public qui gâche beaucoup la trame. Les scènes délicieusement immondes de Nesbø (la plongée dans la merde des chiottes de campagne, le découpage de torses aux ciseaux à ongles, la découverte de l'impuissance sexuelle du bad guy), ainsi que pas mal de détails croquignolets de l'enquête (l'ambiguité concernant l'épouse et la maîtresse du héros, notamment) sont ripolinés par le film ; il importe d'aller au plus simple, et tout ce qui semblait ardu à rendre à l'écran trouve ici sa solution la plus basique : on l'enlève... C'est bien dommage, il y avait de la place pour un bon vieux thriller glauque, et Tyldum ne réalise qu'une agréable course-poursuite à la résolution un peu plate.
Bon, ceci dit, le film est honnête et agréable. Si on excepte la première demi-heure, où l'acteur (Aksel Hennie) peine à convaincre en as de la psychologie et des ressources humaines (qui peut être impressionné par ses dents serrées et son ton suave de pacotille ?), le reste se suit sur un rythme trépidant. Tyldum est présent dans les scènes de suspense, excelle à accumuler sur les épaules de notre héros les tracas les plus divers, et l'acteur est bien meilleur dans les tourments que dans le glaçage des bureaux d'entreprises. Il y a un petit côté The Hitcher en plus moderne dans l'acharnement du tueur à traquer coûte que coûte le héros, la résolution, même moins complexe que dans le roman, tient le coup, et on ferme sans problèmes les yeux sur les invraisemblances du récit, tant tout cela est mené simplement et pour le seul plaisir de se faire peur. Pas grand-chose d'autre à dire non plus, c'est trop formaté pour être véritablement palpitant, trop poli pour être vraiment intéressant, mais assez "bien foutu" pour faire passer la soirée.