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11 janvier 2012

LIVRE : Conversations avec Martin Scorsese (Conversations with Scorsese) de Richard Schickel - 2011

scorseseMarrant comme toutes les interviews au long cours, maintenant, se piquent d'être sur le même modèle que le Hitchcock-Truffaut. Conversations avec Martin Scorsese ne fait pas exception, puisque Schickel y fait sagement le tour complet de l’œuvre du gars dans l'ordre chronologique, s'arrêtant plus ou moins longuement sur chacun d'eux pour réfléchir avec Scorsese à leur genèse, à leurs détails techniques et scénaristiques, à leur place dans l’œuvre complète, à ce qu'en pense le bon gars avec le recul, etc. Un souci d'exhaustivité qui ne s'étend malheureusement pas aux courts-métrages du début, et qui comporte quelques criants oublis (quid du documentaire sur le cinéma américain, par exemple ?). Bon, en tout cas, c'est bougrement intéressant de se remettre en tête l'impressionnante filmographie du sieur, et de constater avec quelle acuité il se souvient des détails maniaquement précis de la conception de ces quelques 30 films. Qu'il s'agisse des premiers tours de manivelle sur Boxcar Bertha, de la tronche de Di Caprio quand Nicholson lui pose sans prévenir un flingue sur la tempe, de l'ambiance sur le ring dans Raging Bull, ou de tel minuscule mouvement de caméra pour recadrer un visage dans Kundun, la précision de Scorsese est sidérante, non seulement sur le coup, mais encore plus avec le recul des années. Après la liste commentés des films, les deux compères reviennent sur certains aspects technique du style-Scorsese (musique, montage (camarade Shang, lis ce passage pour découvrir en quoi le faux raccord est la base de la grammaire scorsesienne), direction d'acteurs), et il suffit de lire les pages qu'il consacre au choix de la palette de couleurs pour chaque film pour se rendre compte à quel point la précision du gars est presque maladive. Il le dit lui-même en fin de bouquin : il a tendance à se prendre trop au sérieux, mais il ne peut pas faire autrement. Chacun de ses tournages apparaît comme une traversée maladive dans les eaux troubles de son mental, comme une épreuve ardue et douloureuse, et ça force le respect de constater combien il a su construire une œuvre aussi tenue en étant aussi torturé. En tout cas, il se souvient de tout, des films qu'il a faits dans le détail, mais également des films qu'il voit ; c'est l'aspect finalement le plus touchant de ce gros livre : la cinéphilie compulsive, l'admiration totale de Scorsese pour les maîtres (Kazan qu'il cite à tour de bras, Capra, Hawks, Preminger, Naruse, Fellini, ...), le regard toujours aussi émerveillé sur la grandeur des classiques. A près de 70 ans, il est encore comme un gosse quand il se rappelle tel zoom avant sur John Wayne ou telle expression sur le visage de James Stewart.

Non sans humour, il reconnaît ses ratages (New-York New-York, The last Waltz, Gangs of New-York, La dernière tentation du Christ...), défend becs et ongles ses films préférés (Kundun, Mean Streets, Les Affranchis) et décrit les concessions, les hésitations, les erreurs et les réussites de sa carrière. Le plus fort, c'est que l'intervieweur, Richard Schickel, apparaît comme un spectateur très difficile, qui n'aime que très peu de films de Scorsese, attaquant sans vergogne là où ça fait mal, jusqu'à faire sortir Martin de ses gonds : on sent une vraie tension quand les gars abordent Shutter Island, que Schickel n'aime pas et dont Scorsese refuse de reconnaître les défauts. Une interview entre érudits, mais sans complicité vraie : voilà peut-être là où on se rapproche le plus de Truffaut et Hitch. Car pour le reste, le livre, même passionnant à plein d'endroits, est encore un peu superficiel, n'allant jamais assez loin dans l'analyse, peinant à retracer le sel de l'époque de l'ascension de Scorsese (les pages sur l'enfance sont, cela dit, remarquables ; mais celles sur les "jeunes loups" qu'étaient Scorsese, Coppola, Spielberg ou de Palma à l'époque sont à peine esquissées). Malgré tout, un vrai trésor pour tout amoureux du cinéma de Martin.

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