L'Ange noir (Black Angel) (1946) de Robert William Neill
Une divine chanteuse blonde (Constance Dowling) est assassinée dans son appartement : parmi les éventuels coupables il y a son ex-mari (Dan Duryea), un ancien amant (John Philipps) qu'elle fait chanter, Peter Lorre,... "C'est Peter Lorre !!!!", attendez, j'a po fini, "Ouais mais c'est Peter Lorre le coupable", je ne dis pas que vous avez tort mais attendez au moins que... "C'est clair, c'est Peter Lorre"... Bon, pas la peine d'aller plus loin, je vois. Ce n'est pas pour en rajouter, mais notre ami Peter joue ici l'un de ses rôles les plus apathiques - une clope constamment pendue au bec, il ose même plus prendre la peine de remuer les lèvres pour s'exprimer, un vrai ventriloque - et interprète un patron de boîte qui a l'air d'en avoir rien à branler de rien : un type antipathique, quoi, le parfait coupable numéro un ; Peter Lorre semble d'ailleurs s'être lui-même fait une raison, il est destiné à Hollywood au rôle de bon vieux salaud... Et pourtant, dans l'histoire, vous allez rire, il se trouve que c'est un autre homme qui se retrouve accusé du crime : un ancien amant a eu la malencontreuse idée de rendre une petite visite, cette nuit-là, à cet ange diabolique, la trouve morte bien entendu, prend la fuite (c'est bêta) et se fait capter dans les escaliers par une domestique (ballot). Je vous jure c'est pas moi ! Mais ouais bien sûr, tu vas faire un ptit tour sur la chaise électrique et puis après on en reparle, ok ? Mais c'est pas moi, putain, il y a Peter Lorre dans le film !...
La seule a lui faire confiance est sa propre femme (classieuse June Vincent), peu rancunière, qui va faire équipe avec l'ex-mari de cette chanteuse (Dan Duryea, excellent pour jouer les alcooliques de base, à se demander si...) pour retrouver le coupable... Ils n'ont qu'une piste, une petite boîte d'allumettes (que serait le film noir américain s'il n'y avait que des zippos...) avec le numéro de la boîte de... Peter Lorre (voilà, j'avais bien raison de dire que, roh ta gueule, ça va, on a compris...). Curieuse association que celle de ces deux individus trompés qui vont finalement s'épauler mutuellement pour retrouver une pointe d'allant ; Dan et June montent un petit duo piano-voix pour se faire engager par Peter Lorre et pouvoir le serrer de plus près (j'adore le flegme de Peter Lorre pendant l'audition de divers artistes : "I hate artists, they are so noisy..." - le vrai dégoûté de la vie...). On sent que malgré les circonstances quelque peu dramatiques, il ne faudrait pas grand-chose pour que nos deux artistes finissent par tomber dans les bras l'un de l'autre. Mais June a la tête solidement sur les épaules et ne pense qu'à sauver son trompeur de mari de la mort - quitte à jouer les grosses salopes auprès de Peter... Seul pitit problème : et si ce n'était pas cet enfoiré de Lorre, l'assassin !!!! (Ahah, je vois qu'on fait beaucoup moins le malin maintenant).
Outre la performance des acteurs et le fait que l'intrigue tienne en haleine jusqu'au bout (c'est déjà beaucoup), on est tout de même un peu déçu par la réalisation de notre ami R.W. Neill (son 108ème et dernier film...) d'autant que la séquence d'ouverture, avec ce magnifique plan partant du lustre et "glissant" jusqu'à notre chanteuse en paillettes, laissait présumer un peu plus de panache dans la mise en scène. La suite se contente d'être honnêtement narrée, laissant aux acteurs le soin de capter toute l'attention. Très correct, dit-il, sans s'emballer (le titre était tellement prometteur, forcément...)
Noir c'est noir, c'est là