[The ballad of] Fultah fisher's boarding house (1921) de Frank Capra
Premier court-métrage de Frank Capra (ah oui, en ce moment on est dans l'ultra-pointu) adapté d'un poème de Kipling. Atmosphère électrique que celle de ce troquet de marins, qui n'est pas sans rappeler d'ailleurs le décors et les personnages du Fièvre de Louis Delluc réalisé curieusement la même année. Le cinéaste nous présente en introduction (le film dure douze minutes et cela prend facilement un bon quart du film) toute une galerie de personnages, des marins divers , une poignées de Malais et la fameuse Anne d'Autriche véritable tigresse croqueuse d'homme - tout un panel de gueules qui n'auraient point déplu à Eisenstein (il fait dans la référence aujourd'hui, Môssieur). Ça se saoule à mort, ça tape du poing sur la table comme des malades, ça s'engueule, ça se bastonne, ça sort des coutelas grands comme ma jambe, bref l'ambiance classique et bon enfant de ce genre d'endroit de perdition. Anne d'Autriche, ne pouvant s'empêcher d'aller d'une homme l'autre, va provoquer une rixe d'enfer après avoir dragué, sous les yeux de son régulier, le pauvre Hans le Danois qui n'avait rien demandé. Heureusement ce dernier a autour du coup un crucifix censé le protéger du danger et ben, ah tiens, non, pas cette fois... Capra nous donne à voir le combat en plongée avant de tenter le "bel effet" en filmant leurs ombres "dansant sur un mur" et, argh, la pointe d'un couteau d'un troisième larron s'avance et c'est le drame... Anne est hystérique mais ne perd point complètement la boule en s'emparant du crucifix pendu autour du Danois dead - c'est clair qu'il a l'air super efficace ce grigri...
Le film peut paraître un peu surchargé en cartons (mais bon, faut bien dérouler, en si peu de temps, l'histoire contée par Kipling), des cartons qui sont, malgré tout, loin d'être inintéressants dans leur conception : le texte apparait sur fond noir avec un (voire plusieurs) personnage(s) éclairé(s) par un faisceau de lumière, des acteurs qui "s'immobilisent quasiment" (mais l'image n'est point arrêtée) le temps du carton, avant que l'action ne reparte de plus belle ; c'est assez original comme procédé, comme idée de transition, le carton semblant plus "suspendre" l'action que réellement l'interrompre. Voilà... Nan, franchement, bien bien, cette première tentative cinématographique du gars Frank.