Tension (1949) de John Berry
Plutôt roublard, ce flic suave (Barry Sullivan) qui annonce d'entrée de jeu la couleur : les criminels, c'est comme les élastiques ; suffit simplement de faire monter la tension avant qu'ils pètent... John Berry s'appuie sur une distribution solide (Richard Basehart en citoyen moyen qui se rêve meurtrier, Audrey Totter en pétasse blondasse (ouah le brushing de ma grand-mère) avec des seins pointés en avant, véritables missiles à pointe chercheuse en quête du premier type le plus friqué (c'était ma journée sein - on est vendredi, normal), Cyd Charisse en brunette girl next door ultra mimi) et sur un scénar plutôt malin : comment réussir le crime parfait ? 1) Se constituer une nouvelle identité, 2) Menacer la future victime en clamant haut et fort son nouveau nom 3) Descendre le type 4) Retourner à sa petite vie tranquille... Y'a po de faille, dans la mesure où on ne peut rechercher un type qui n'existe pas... Belle théorie, c'est vrai. Le premier hic dans l'histoire c'est 1) Ne pas tuer le type 2) Se faire prendre malencontreusement en photo avec son nouveau look (le type troque ses lunettes pour des lentilles : il devient totalement méconnaissable - je déconne) 3) Apprendre que sa cible a été finalement assassinée... Le crime du siècle ne tarde point à devenir le plan le plus foireux de l'année. C'est justement ce qui va arriver à ce pauvre Quimby (Basehart)...
Que les femmes blondes peuvent donc s'avérer parfois énervantes, diable ! Quimby a décroché la timbale en épousant cette Claire dont le petit jeu de séduction est aussi transparent qu'une fontaine ; tu lui promets un vison, tu la fais monter dans ta grosse bagnole, tu as toujours en poche un petit paquet de biffetons, l'une de ses options suffit pour l'embarquer (histoire de la jouer réglo, elle n'oublie jamais quand le cas se présente d'enlever son alliance - beau réflexe)... Un véritable cauchemar blondulant pour notre ami Quimby qui, taillé dans un canif (le manche), ne peut même po péter la tronche aux types qui embarquent sa gonze - il tente bien, pourtant, juste une fois : il se fait démonter comme une porte sans gonds. Marre, non vraiment marre de se faire toujours avoir, d'où le petit plan futé énoncé ci-dessus qui prend jour dans sa cervelle. Il est tout fier avec son nouveau costard, son joli chapeau et ses petites lentilles quand il se mire dans sa glace. Bien joli de jouer les Mr Hyde quand on a pas la trempe d'un Je-Kill. D'où foirage absolu, ce qui est bien dommage quand on vient juste de faire la connaissance de la femme de sa vie (La Cyd qui a du coeur). Faut dire qu'il a doublement pas de bol : non seulement on tue sa cible mais en plus il tombe sur un flic ultra filou. Il faut voir ce dernier jouir en arrière-plan quand il confronte la Cyd (à la recherche de son nouveau voisin qui a disparu) au bon Quimby qui a repris son identité d'origine ; pire, le sale cop se montre capable de séduire en un tour de main la Claire pour mieux pouvoir la manipuler... Il a en plus cette affreuse manie de triturer un maudit élastique et on sent bien qu'il en a déjà pété des dizaines dans sa carrière. Il est tellement fourbe qu'il est bien foutu de nous servir un happy end... Rah, je voulais du noir, moi, du pur qui finit mal... Le scénar saura-t-il se faire retors jusqu'au bout... hum, hum.
Chacun des personnages joue bien son jeu mais presque trop, finissant par paraître à l'usage tout d'un bloc. Quimby, bon comme du bon pain (quand il s'empare de ce trident pour égorger un type, on a peur qu'il se blesse), Cyd d'une fidélité à toute épreuve, Claire vraie salope jusqu'au bout des ongles et du soutien-gorge (j'arrête là sinon Gols va finir par me censurer), et puis surtout ce flic sacrément trop fort dans sa capacité à vouloir s'engouffrer dans chaque petite faiblesse du trio. On ne va tout de même point bouder son plaisir (surtout pour un film de la famille Berry (mouais)) juste regretter que les élastiques soient finalement aussi fragiles.