La petite Voleuse (1988) de Claude Miller
Sans qu'il soit forcément question d'employer les grands mots et de dire qu'il ne faut de toute façon jamais renier ses amours de jeunesse, j'aurai toujours pour La petite Voleuse - tout comme pour L'Effrontée d'ailleurs - une immense affection. Double féminin d'Antoine Doinel, la Janine Castang a un sacré caractère, ses choix résultant plus d'une soif de liberté instinctive et d'une envie d'absolu que d'une véritable réflexion. On retrouve bien sûr toute une thématique truffaldienne qui fait chaud au coeur dans ce récit d'éducation sentimentale (l'adolescente abandonnée par ses parents en butte au discours moralisateur des adultes, les ptites fauches pour vivoter, l'envie de passer ses journées au cinoche et celle de voir enfin la mer...), des dialogues qui respirent la "voix du maître" ("tant qu'on a pas tout fait pour quelqu'un, on a rien fait") jusqu'à certaines scènes typiques du cinéaste - après avoir fait l'amour pour la première fois avec son amant plus âgé (le bienveillant Didier Bezace), Janine trouve sur le pas de sa porte un chaton ("il y a toujours un chat quand deux personnes s'aiment..." chuchote outre-tombe le François) auquel elle donne un bol de lait - l'écho à La Nuit américaine étant on ne peut plus clair.
J'avais peur que le film ait terriblement vieilli, notamment au niveau de l'image - ben non, esthétiquement le choix de tons marron-bleu-gris se tient -, les dialogues (que je connais pratiquement par coeur - ça fait peur vu que cela fait bien 20 ans que je ne l'ai point revu) gardant également la même fraîcheur - faut dire que la Charlotte est déjà au top au niveau de la spontanéité, distillant ses réparties de sa petite voix fluette qui fait toujours mouche ("Aïeuhhhh", "Ben ouais", "Tu veux ma photo ?"...). Sa façon de reprendre toujours maladroitement les mots et les expressions qu'elle entend dans la bouche des adultes demeure toujours aussi touchante et drolatique. Grand plaisir de retrouver l'ami Simon de La Brosse et "vachement meuh-meuh" (semaine spéciale Simon après avoir revu Les Innocents) ainsi que le minois de la chtite Nathalie Cardone dont je peux enfin avouer maintenant avoir été secrètement amoureux pendant ma tendre jeunesse (me dites pas ce qu'elle est devenue, elle a jamais fait mieux...). Alors oui, la mise en scène de Claude Miller ne restera jamais dans les annales (et je ne parle point des nombreux faux-raccords qui m'ont fait souvent tiquer, mais ne soyons point mesquin), gageons simplement que le Père François n'ait point regretté de voir, de là-haut, le gars Claude reprendre le flambeau pour donner vie à cette magnifique héroïne tête de lard, combattive et férue de liberté.