A propos des Chansons paillardes au Japon (Nihon shunka-kô) (1967) de Nagisa Oshima
Pas toujours facile à suivre, le gars Oshima, dans ses oeuvres contestatrices des années 60, et on tente, tant bien que mal, d'en capter l'esprit tout en savourant au passage la précision de la mise en scène, la beauté indiscutable des cadres. Avec, dès l'introduction, cette tache de sang sur de la moquette rouge qui se met à prendre feu - ah tiens le drapeau du Japon se dit-on -, on sent bien qu'Oshima garde en lui cette volonté de mettre à feu et à sang cette société nippone. Il nous donne à suivre quatre étudiants qui ont des allures, dans leur démarche en groupe, de pochette de disque des Beatles, à cela près qu'ils n'ont pas le même succès : qu'il s'agisse de réussite scolaire - ils sont à Tokyo pour passer leur examen d'entrée à l'université - ou qu'il soit question de leur rapport aux femmes ; plus aptes à jouer les grandes gueules qu'à passer à l'acte, plus aptes à fantasmer sur des scènes de viol qu'à donner du plaisir, notre quatuor qui marche sans but (magnifique plan dans la neige) et sans réelle conviction fait un peu pitié. Le film a beau être peuplé de jeunes femmes à tomber, aucun doute que, plus que jamais, dans cette oeuvre d'Oshima la chair est triste (la scène de fantasme derrière le bureau sur un sol jonché de poussière) voire mortifère (l'accouplement en présence d'un cercueil).
Nos quatre gaziers se retrouvent dans un bar avec leur prof et trois autres chtites étudiantes : si ce dernier, complètement ivre, tente de les pousser à la révolte, on ne peut point dire qu'il atteint son but ; si les trois chtites, elles, grandes fans, boivent ses paroles (sans forcément les comprendre...?), notre quatuor, préoccupé uniquement par la baise, reste sourd à son discours. Pire, lorsque l'un d'eux aura l'occase de sauver ce prof agonisant, il ne sera même po capable d'agir. Ils ne garderont de lui que cet air de chanson paillarde qu'ils se plairont ensuite à reprendre à tout bout de champ : c'est un peu maigre comme "hymne" dans cette société où les débats politiques font rage (de la manif nationaliste pour le retour de la "journée de la fondation de l'Empire" au meeting contre la guerre ménée par les Ricains au Vietnam). Nos quatre jeunes ont bien du mal à "passer à l'acte" (amoureux ou révolutionnaire) et apparaissent le plus souvent comme quatre branquignols, aux instincts "primaires", dans une société où ils ne trouvent apparemment pas leur place. Une errance existentielle, plus rythmée par les diverses chansons que par les rebondissements, auquel nous convie, en véritable esthète cinématographique, un Oshima engagé.


