The Colter Craven Story de John Ford - 1960
Je rends coup pour coup au camarade Shang, qui m'a cherché récemment en dénichant une rareté de Ford. The Colter Craven Story est peut-être moins chaud à trouver, mais il n'empêche : la guerre est déclarée. Voilà, bon, sinon, le film... Eh bien il fonctionne justement parce qu'il est rare, et que c'est toujours jouissif de se taper un truc que personne ne regarde plus. A part ça, il faut reconnaître qu'on est dans le fonctionnel, et que ça n'ajoutera rien à la gloire du réalisateur. C'est pas raté non plus, non. C'est même plutôt attachant de voir ce vieux briscard de Ward Bond remonter à cheval à 108 ans et parvenir encore à mettre des énormes gifles aux petits jeunes de 18 berges. Mais c'est pas réussi-réussi non plus.
L'historiette est délicieusement moraliste et virile comme il se doit quand on s'appelle John Ford : Bond, qui mène une caravane de carioles on ne sait trop où, croise sur son chemin le Docteur Craven, épave alcoolisée comme Shang et Bas**en réunis. Le doc a perdu toute confiance en lui pendant la guerre, et la responsabilité de tous ces hommes qu'il n'a pas pu sauver l'a transformé en minable. Il se sent incapable d'opérer une femme du convoi qui va accoucher. Mais Bond aura vite fait de lui remonter le moral par une de ces histoires édifiantes dont il a le secret : en son temps, il a connu un gars comme Craven, tout rongé par l'alcool ; mais la guerre en a fait un homme, un vrai, nom de nom, et il est devenu président des States... Ah oui, chez Ford, la guerre ça vous forge un homme, point barre. Bref, tout ça ne pète pas très loin, et on préfère à ce discours tonitruant les petites saynettes quotidiennes du convoi, les petits personnages secondaires qui mettent du dynamisme à l'ensemble. Le film, fait avec peu de moyens pour la télé (la série Wagon Train), se cantonne à un savoir-faire sans éclat, malgré quelques jolies sorties qui changent un peu de ces plans en studio assez cheap. La curiosité principale, c'est que John Wayne a un tout petit rôle là-dedans, celui d'une silhouette en contre-jour : on le reconnaît immédiatement, d'abord par sa façon de se tenir, ensuite par sa voix ; c'est ça, les légendes. A part ça, c'est aussi bon que le reste.