La Main qui venge (Dark City) (1950) de William Dieterle
Histoire de reprendre contact avec le cinoche, rien ne vaut mieux qu'un petit polar des fifties : William Dieterle aux manettes - jamais avare dans les changements d'angle de prise de vue lors d'une même séquence -, Charlton Heston dans l'un de ses tout premiers rôles, Lizabeth Scott (un genre de mix entre Michèle Morgan et Lauren Bacall, mais ça fait longtemps que je ne suis pas allé chez l'ophtalmo) en blonde chanteuse divine, Viveca Lindfors en brunette blessée, Franz Waxman à la baguette..., on est peut-être loin des must du genre - un final en particulier un peu trop sucré pour un film noir... - mais on ne va point faire la fine bouche pour cette reprise cinématographique.
Charlton Heston incarne un jeune loup magouilleur qui semble avoir déjà perdu une bonne partie de ses illusions - une première histoire d'amour qui s'est, forcément, terminée d'une triste (et sanglante) façon...; il fréquente une jeune femme blonde (Scott) qui n'a d'yeux que pour lui et un groupe de joueurs de poker à la ramasse avec qui il monte à l'occase des entourloupes. Il met justement la main sur un pigeon venu en ville pour encaisser un chèque de 5.000 dollars ; c'est le plan classique : faire gagner le gazier le premier soir pour le plumer le second. Le bazar se passe dans les règles de l'art jusqu'à ce qu'il y ait un os : non seulement le pigeon se suicide dans la foulée (po facile d'encaisser son chèque sans s'attirer les soupçons) mais le frère de ce dernier part en chasse des trois filous : un des trois filous se fait rapidement étrangler dans sa chambrette, les deux autres de se tenir dorénavant sur leurs gardes...
Des personnages typiques - Heston, je m'en foutiste et tombeur (il parviendra à séduire la femme du type suicidé pour avoir des indications sur l'homme qui les chasse - sans pitié ? po sûr, vu qu'il a encore un petit coeur qui bat), son partenaire de jeu, au regard plus torve qu'un caméléon en fuite, un tueur invisible dont on aperçoit jamais que la grosse bagouse au doigt -, les lieux incontournables du genre - le cabaret de base qu'enchantent les mélodies de Scott (fusil, ça c'est de la robe à paillettes !), la bonne vieille table de poker ou les tapis verts de Las Vegas, un commissariat de police (beau face-à-face notamment entre Heston et le commissaire - excellent Dean Jagger), et un climat qui devient de plus en plus lourd à mesure que le tueur s'approche de ses proies. La caméra de Dieterle n'hésite jamais à s'approcher au plus près des visages, notamment lorsque Heston côtoie ses deux conquêtes, et nous livre même une petite scène romantico-spatiale dans un planétarium aux dialogues finement ciselés ("- Only the stars can not change" dit un Heston nostalgique, "- Because you can't reach them" répond la brunette lucide, - "You can reach them" repond un Heston finalement moins pessimiste que l'on ne croyait). Dieterle conclue son film sur un tarmac casablanquesque avec un happy end certes un peu facile. On a tout de même eu droit au passage à notre petite dose hebdomadaire d'encre noire.