Ju-on/The Grudge 2 de Takashi Shimizu - 2003
Je continue à être très admiratif devant le cinéma de Shimizu et devant l'incroyable variété de ses inspirations pour créer des effets d'angoisse. Ce Ju-On/The Grudge 2 est un véritable festival d'idées, toutes réussies, et c'est même étonnant de constater comment Shimizu parvient à faire un tour dans un spectre très large de genres en parvenant à chaque fois à créer la peur.
Comme ses prédecesseurs, ce nouvel opus est une suite de "sketches" vaguement reliés entre eux par une trame : la maison hantée où a eu lieu une série de meurtres ; tous ceux qui ont un contact avec elle deviennent maudits et meurent dans des conditions troubles après avoir rencontré ce petit couple de fantômes parfaitement terrorisant. Comme ses prédecesseurs, ce film-là se fout complètement du scénario, et préfère nous donner à voir un exercice de style virtuose et sans cesse renouvelé : à chaque nouvelle mini-histoire, on découvre un nouvel angle, une nouvelle inspiration. Ca va du "giallo" à la Dario Argento jusqu'à la pure tradition japonaise, en passant par un fantastique presque onirique, ou par des effets très "contemporains (les nouvelles technologies comme vecteurs de revenants en tout genre). Shimizu surprend toujours par la somme d'idées, par cette façon toujours inventive d'utiliser la moindre parcelle de son décor, le moindre détail d'accessoire : une photocopieuse peut faire surgir un fantôme, tout comme peuvent le faire une vitre teintée, un banc de montage, un lit ou une simple tâche au sol. On ne sait jamais d'où la peur va surgir, ni à quel moment : contrairement à ses collègues, Shimizu ne prépare que très peu les effets, démentant cette règle de gramaire éternelle qui veut que ce soit l'attente de la peur qui soit la plus terrible. Ici, l'effet peut indifféremment prendre la forme d'un electro-choc (on ouvre une innocente porte, et hop le spectre est derrière), d'une longue tension sans cesse étirée, d'une cascade de détails de plus en plus horribles, d'une simple étrangeté... C'est justement parce qu'on ne sait jamais comment Shimizu va traiter son plan qu'on a réellement peur.
Peu à peu, l'écheveau se met en place, et ces différents sketches finissent par ne faire plus qu'une histoire par un montage assez virtuose. Chaque "tranche" de film est en fait un point de vue différent amené par tel ou tel personnage, ce qui fait que la chronologie est balancée cul par-dessus tête, et que les mêmes scènes peuvent être répétées plusieurs fois en changeant la façon de les voir. Habile effet qui fait sortir Ju-On/The Grudge 2 du simple film à effets pour lui donner l'aura d'une véritable réflexion sur la possibilité du cinéma ; idée renforcée par le choix du contexte du film : une équipe de cinéma chargée de réaliser un documentaire sur la fameuse maison hantée. Cette jolie mise en abîme finit par être assez vertigineuse dans la toute fin du film : Shimizu atteint avec cette énième variation sur le même thème une grandeur totale.



