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7 février 2010

J'ai le Droit de vivre (You only live once) (1937) de Fritz Lang

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Encore un chef-d'oeuvre de Fritz Lang ? Eh bien oui, ne soyons pas bégueule, tant You only live once est un petit trésor d'émotion, à la fois film noir de la plus belle beau et drame romantique à y laisser sa chemise. L'histoire est particulièrement dense, jamais avare de rebondissements, et le couple phare formé par la magnifique Sylvia Sydney (la mère de Marion Cotillard ? Euh nan) et l'impressionnant Henry Fonda (le seul homme qui en bougeant juste un micro-muscle du visage passe de la dureté impassible à la gentillesse pure) est parfaitement convaincant - et diablement attachant sur "la ligne finale". Le personnage incarné par Fonda est relativement complexe, type a priori guère sympathique, condamné déjà trois fois - pas un ange donc - qui va tenter de se refaire une auréole... Un peu tard, jeune homme, même s'il veut encore déspérément y croire - on ne vit qu'une fois, fils, on a aussi qu'une seule étiquette, alors avoir une quatrième chance, dans notre société... Il aura tout de même une ultime opportunité pour s'en sortir lors d'une séquence cruciale absolument géniale entre ombre et brouillard. Film noir, oui, mais sans femme fatale, Sylvia Sidney incarnant la parfaite amoureuse enchaînée à son homme. On a beau penser dès le départ, tout comme son proche entourage, qu'elle fait la connerie de sa vie, elle prouve qu'à la longue l'amour est bien la seule chose qu'on ne peut enlever à qui que ce soit et qu'il se révèle l'unique porte de sortie salvatrice. Fritz Lang est un véritable Dieu.

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Surtout ne pas déflorer l'intrigue, tant elle réserve son petit lot de surprises. Juste pour appâter, disons qu'Eddie Taylor vient tout juste de sortir de prison - après trois longues années - et qu'il retrouve son amante toujours aussi passionnée, Joan (Sylvia Sidney); ce petit bout de femme rayonnante semble liée corps et âme au destin de cet homme peu recommandable : leur premier baiser à l'écran s'échange à travers les grilles de la prison (magnifique utilisation de ce motif tout au cours du récit, avec la Sylvia comme enfermée dans sa cage amoureuse) et sitôt libre, lors de leur lune de miel, Eddie se fend d'un commentaire sur les crapauds qu'ils regardent ensemble plutôt lourd de sens : quand l'un des deux meurt, l'autre clamse dans la foulée... Ca c'est dit, ils sont inséparables. Lang nous montre le reflet dans la mare de ce couple qui voudrait y croire, leur image soudainement troublée par, justement, le saut d'un crapaud... Comme une vision idyllique de leur romance qui ne tarde point à s'effacer : la machine tragique est en marche... Eddie veut pourtant absolument y croire cette fois-ci même s'il peine d'entrée de jeu à avaler le fait qu'on les ait virés de leur chambre : les tenanciers avaient reconnu cet ancien accusé, il est vite devenu persona non grata. Coup de Trafalgar : à cause d'un simple retard, son employeur le fout dehors : Eddie semble maudit, comme s'il avait perdu toute crédibilité aux yeux des autres... Difficile après être passé de l'autre côté "de la grille" d'espérer retrouver la confiance de la bonne société. Eddie est-il définitivement fourbe ou est-il taillé sur mesure pour devenir le bouc émissaire d'une société d'enragés (la sortie du procès, énorme) ?

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Lang livre quelques séquences d'anthologie lors desquelles la "frontière" entre le bien et le mal, la confiance en son prochain et l'instinct de survie, le paradis et l'enfer sont magnifiquement évoqués (la fuite de prison et le final admirable, entre autres). Eddie paie-t-il son passé cash - deux récidives à son actif tout de même - ou se retrouve-t-il pris malgré lui dans le cycle infernal de cette société ?: condamné une fois, damné à vie... Lang sait varier les plaisirs au niveau narratif (la prison, l'espoir, la rechute (?)...) avec une dernière partie à la Bonnie and Clyde version loose et bisounours (un couple plus porté sur le biberon que sur les flingues)... Plus le récit avance, plus il devient palpitant, le personnage de Fonda gagnant au passage plusieurs couches de profondeur : un type plein de faiblesses évidentes mais avec un côté "nerfs à vif", sensible, finalement attachant - un humain, quoi. Lang parvient à nous cueillir avec cette fin endiablée où la foi amoureuse enveloppe le tout avec un ruban noir. On sait qu'on vient de découvrir une nouvelle merveille du maître, amen.

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