Torpedo Squadron 8 de John Ford - 1942
Un court-métrage sans parole tout en dignité qui convoque une dernière fois les fantômes de gaillards tombés pendant la bataille de Midway. L'essentiel du film est constitué de portraits d'hommes deux par deux, avec juste avant leurs noms inscrits à l'écran : les gusses sont morts, on les montre, point barre. Le texte du début nous prévient : ces gens sont des héros qui ont été la gloire de leur pays, et vous avez pas intérêt à émettre une réserve. On peut frémir devant ce court plan montrant un militaire dessinant une bouche et des yeux grotesques à une bombe grosse comme mon appart, mais Ford, lui, ne voit pas ça comme ça et ne pratique nulle nuance : gloire sans demie-teinte à nos aviateurs. Torpedo Squadron 8 est un monument aux morts qui bouge, avec ce que ça comporte de carré et de figé. On retrouve cette humanité précieuse de Ford qui, pour parler de la guerre, focalise sur ce petit groupe d'hommes plutôt que sur l'énormité des combats. On peut préférer malgré ça les plans plus "reportage" sur les faits et gestes de ces militaires, les avions qui décollent, les foules qui courent, etc. Plus "neutres", ces images paraissent plus honnêtes, moins propagandistes. On peut préférer encore plus ces deux plans de la fin qui montrent des ciels magnifiques : le message est que nos héros sont partis au ciel, mais on y voit surtout un brusque accès de rêverie au milieu de la commande. Quelle que soit la situation, Ford adore filmer les ciels, c'est comme une obsession, et ce décrochage poétique est bienvenu.