L'Homme à l'Affut (The Sniper) (1952) d'Edward Dmytryk
Aucune véritable star pour ce polar très efficace tourné dans les rues de San Francisco (ah Vertigo, décidément) et signé Dmytryk. On a droit à une petite présentation liminaire qui nous parle des multiples crimes et délits en rapport avec le beau sexe. On s'attend alors à l'histoire d'un vieux pervers qui se jette rageusement sur les femmes, sans trop y croire. Finalement, on aura droit à un type véritablement dérangé pour ne pas dire en transe, dès qu'il a le malheur de croiser une femme - surtout lorsqu'elle embrasse un garçon. Très peu d'indices seront donnés sur les origines d'un tel traumatisme (on le voit tout de même s'offusquer lorsqu'un gamin reçoit un taquet... de même, son traumatisme semble avoir quelques liens avec le base-ball (une mère castratrice qui l'a empêché de jouer étant plus jeune ?...)). Le fait est que la proximité des dames le fait suer et, incapable de tirer son coup (le jeu de mot suit), il tirera dessus - je me permets d'être un tantinet graveleux, vu la façon dont le gars caresse, pour ne pas dire, tripote son arme avant de viser sa proie... On peut montrer un meurtre au cinéma, un viol, c'est plus délicat...
Ce qui surprend, au départ, c'est de constater à quel point notre homme est conscient de son mal. Voyant la pression dangereusement monter en lui, il tente d'avertir le médecin qu'il avait en prison (il a déjà fait 18 mois de taule pour agression) - on pense à In Cold Blood -: échec. Il passe à la vitesse supérieure en se brûlant la main droite sur une plaque chauffante (aïeuuuh) avant de se rendre à l'hôpital : il a beau alerter les médecins sur le fait que cette blessure pourrait être volontaire, tout le monde s'en fout... Et notre gars, dans la foulée, de craquer. Le premier coup de feu est relativement violent et assez inattendu - on vient tout juste de faire connaissance avec l'actrice potelée avec un nom un peu zarbi (Jean Darr - votre père est flic ? désolé - bien aimé aussi d'ailleurs l'inspecteur de police nommé sobrement Kafka - ils se sont bien marrés les scénaristes) et elle se prend une balloche dans la tête qui lui fait s'exploser la tronche dans une vitrine. Oups. Il faut voir ensuite notre gars au comptoir d'un bar tout jouasse comme s'il avait enfin tiré sa crampe... Notre homme est lancé, c'est juste le début de la série, et il fait vraiment pas bon être une femme brune entre deux âges... (notons également au passage le "superbe" meurtre (visuellement parlant) du gars qui monte le long de la cheminée, du beau boulot)... La police est dans tous ses états, et notre homme traqué dans les rues de San Francisco de nous faire une petite visite cinématographique très plaisante de la ville. Face aux types qui veulent sa peau à tout prix, un psychiatre élève la voix et livre un discours anti-sarkoziste qui fait plaisir; il rappelle à tous ces abrutis de responsables qui crient au loup, que le type qu'ils recherchent, s'il avait été correctement soigné dans un hôpital au lieu d'être envoyé inutilement en prison, eh ben on aurait sûrement pas ce genre de situation. On opine, même si on connaît finalement assez peu de tueurs sexuels dans son entourage. Notre malade en tout cas envoie lui-même une note à la police pour exprimer son désir d'être attrapé, et la fin est, si je peux me permettre, pathétique en diable... Une oeuvre rondement menée avec quelques giclées de violence propres au genre, un serial-killer aux allures de bête sauvage effarouchée superbement interprété (Arthur Franz, si tu nous écoutes du haut des cieux) et un scénar loin d'être innocent sur le fond : bref une belle découverte de la part de ce réalisateur avec deux "y" et un "k".