Che : Guerilla (Che Guerrilla) de Steven Soderbergh - 2009
C'est quand même un curieux projet que ce Che : on ne sait jamais trop ce que Soderbergh veut faire, et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il déploie un bel effort pour éviter les pièges du biopic habituel. Après un premier épisode sans sève, qui ressemblait plus à Tintin et les Picaros qu'à une reconstitution historique, le voilà qui déjoue les attentes avec l'épisode 2. On attendait un film politique, qui montrerait les rapports entre Guevara et Castro une fois la révolution cubaine accomplie ; Soderbergh zappe soigneusement cette partie, et se concentre sur les combats du Che en Bolivie, dans la jungle hostile.
Soderbergh réussit à rendre compte de ce qu'est une guerilla au jour le jour. dans le premier opus, on avait l'impression d'une promenade de santé ; ici, on a droit à tous les détails (jusqu'au gavage) de chaque petite avancée de la Guevara Team, et on sent mieux que c'était pas forcément la fête du slip. Ca tombe malade, ça meurt de faim, ça se reçoit des balles dans le pied, ça déserte à tour de bras... L'épisode parvient un peu mieux à toucher du doigt la difficulté, et du coup l'échec latent, de la révolution en milieu hostile. en restant au plus près de ces combats, sans jamais élargir à ce qui se passe en dehors de la jungle, le film porte en lui cette vanité de la lutte du Che, ne voyant pas que le fait de vouloir reproduire la victoire cubaine dans un autre pays ne fonctionne pas. Du coup, tout l'aspect historique ou politique passe à l'as, et c'est bien un peu dommage, mais la partie intime est mieux rendue, plus prégnante.
Ceci dit, on se fait un peu chier aussi. A force de détails, à force de vouloir tout montrer du quotidien de cette troupe perdue dans la forêt, le film est souvent aspiré dans le vide, et certaines scènes sont complètement inutiles (des rencontres qui n'aboutissent à aucun évènement particulier (l'épisode Debray), des pistes qui ne sont pas explorées). Si Soderbergh réussit relativement bien les moments-clé de son récit (la capture du Che, filmée dans toutes les tactiques de l'armée, dans tous les détails), il peine à rendre intéressants les moments de calme, faute justement d'évènements : finalement, la vie d'un guerillero, c'est surtout des grands moments où il ne se passe rien, et ça c'est pas la tasse de thé de Soderbergh. Pour passer le temps, il fait quelques tentatives douteuses, comme celle de colorer dans un bizarre gris-bleu la forêt bolivienne (l'opérateur en est encore malade) ou de fabriquer des nuits américaines franchement too much (un bleu pétard qu'aurait refusé Beineix). Pour finir par une trouvaille dont il a l'air très fier : filmer la mort du Che en caméra subjective, ridicule idée qui rompt complètement avec l'esthétique d'ensemble (on a droit à un flou lors du dernier souffle, c'est tout naze). Ces pauvres figures de style ne font pas oublier l'aspect impersonnel de l'ensemble du projet, et la saga-Che devrait retomber dans l'oubli d'ici peu. Préfèrez Ocean's 11 pour voir du vrai Soderbergh.
le premier épisode est là