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18 mars 2022

L'Effrontée (1985) de Claude Miller

A0001141Je pourrais le revoir des centaines de fois et j'aurais toujours une énorme tendresse pour ce film. Forcément j'avais le même âge que la chtite Charlotte quand j'ai découvert ce film et il est difficile de renier ses premiers émois... Rares sont les films qui reviennent sur l'adolescence avec une telle justesse, sans vouloir à tout prix forcer le trait. Les indécisions de cette pauvre Charlotte, prise à la sortie de l'enfance et avec déjà un petit pied chez les adultes (ah le passage du globe terrestre écrasé sur la tronche de Jean-Philippe Ecoffey), demeurent touchantes et ces rêves de partir avec Clara Baumann, s'ils sont pathétiques n'en sont pas moins révélateurs de cet âge des espoirs... désespérés. Des dialogues pointus qui continuent de m'arracher un sourire ("La vie, elle est brusque..."; "La maison la plus moche, c'est la mienne"; "Charlotte, il me faut au moins mes trois bols de café avant de commencer toute discussion avec toi..."... ad lib), un casting au petit poil entre les éternels Brialy et Lafont, le regretté Simon de la Brosse et le bourru Raoul Billerey et une image toute ensoleillée pour cet été d'apprentissage. Voilà le genre de film, sans en faire non plus un chef-d'oeuvre, qui gardera quoiqu'il advienne toute mon affection. Cela fait plaisir parfois de se dire qu'on ne se refait pas et que certaines choses gardent malgré les années leur petit éclat. Je vous rassure, pour pas trop déconner quand même, Charlotte n'est plus la femme de ma vie, hum...   (Shang - 12/10/08)

L_Effrontee


x1080

S'il y a bien un film de Charlotte Gainsbourg pour nous mettre d'accord avec Shang, c'est à coup sûr L'Effrontée, petite merveille que moi aussi, je peux revoir éternellement sans me lasser. Tout est juste, tout sent le vrai dans cette minuscule histoire qui s'apparente plus à une tranche de vie, à un instant pris dans la vie d'une enfant en train de grandir qu'à une fresque ambitieuse. L'espace d'un indolent été, Charlotte va éprouver l'envie d'ailleurs, la camaraderie, le trouble sexuel, l'autonomie, autant de sensations et de sentiments forts qu'elle va devoir affronter avec son corps de sauterelle et son caractère renfermé mais rebelle. Dès la première scène, cette série de plongeons ordonnée par le maître, on sent l'authenticité : il suffit d'un plan sur Charlotte, alors juvénile, croisant ses bras sur la poitrine qu'elle n'a pas encore, toute tordue et morte de peur face aux sarcasmes des autres collégiens boutonneux, pour qu'on y croit et qu'on décide de suivre aveuglément la fillette. Chaque séquence qui va suivre, tout en creusant un peu plus le personnage, va nous confirmer dans cette impression de justesse totale. Tout tient dans les détails : les noms des trucs (la boîte de nuit s'appelle le Roule-Roule, le parfum le Blue Moon, c'est adorable), les dialogues tout petits ("Moi je veux pas que Charlotte elle va avec la pianiste", "Tu trouves pas que la vie, elle est brusque ?"), la musique ("Sara Perche ti amo", choix parfait, qui représente un état de l'enfance, lumineux et nostalgique), les personnages (le parfait Raoul Billerey qui éteint toujours la lumière derrière sa fille, la mutine Bernadette Lafont, cette gamine incroyable de vérité qui joue Lulu, Simon de la Brosse en grand frère un peu indifférent mais tendre), la beauté des ambiances (les souffles de vent dans les arbres, le soleil qui tape, la lumière des soirs d'été, les ors des théâtres municipaux de province).

charlotte-gainsbourg

C'est grâce à tous ces détails que Miller parvient à la magie, et ce sont eux qui lui permettent d'exercer sa modestie légendaire en faisant mine de se retirer de son film. A priori, celui-ci ne paraît pas vraiment signé, et pourtant il faut un sacré regard pour parvenir à rendre si crédibles tous ces petits éléments, et à nous bouleverser avec une histoire aussi minuscule. Et c'est franchement tout à l'honneur de Miller de ne jamais se la péter, de se mettre toujours au service des personnages et de sa petite comédienne, de s'effacer pratiquement derrière la beauté de ce qu'il raconte. Il renoue ici avec un certain esprit de la Nouvelle Vague, non seulement en lui empruntant ses deux acteurs mythiques, mais aussi en pratiquant un art de la liberté, du cinéma direct, assez proche du Truffaut des débuts. En tout cas, sur l'enfance, on aura rarement vu film aussi juste (une poignée, Kiarostami, Pialat, Ozu, Bergman, Spielberg, ont aussi bien réussi dans le genre) et aussi touchant. On aimerait vivre toute sa vie dans L'Effrontée, malgré sa rudesse parfois, malgré sa mélancolie. Charlotte, for ever.   (Gols - 18/03/22)

Commentaires
S
Un refuge nostalgique inusable, oui. A la petite liste j'ajouterai le Saura de Cría Cuervos et l'Eustache de Mes Petites Amoureuses. Et peut-être (à voir comment il vieillira) le dernier Sciamma.
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