LIVRE : Inguélézi de François Dupeyron - 2004
L'idée de départ est déjà un peu tirée par les cheveux, de la ficelle aussi grosse - allons j'ose - que ce personnage principal qui souffre de son embonpoint. A peine remise de la mort de son mari qui souffrait depuis plusieurs mois d'un cancer, Geneviève - pas de bol - trouve, par hasard, dans le coffre de sa voiture, un clandestin kurde, tout juste rescapé d'un accident auquel elle vient d'assister. Ah oui, le ressort romanesque ne fait pas dans la dentelle et l'on voit bien à quel point notre Geneviève va pouvoir opérer une sorte de transfert affectif, servi sur un plateau. En toile de fond, il y a les éternels rapports difficiles avec sa môman et sa gène à ne pas toujours être présente pour s'occuper de son fils. Bref, c'est pas la joie, pas le genre de truc à lire sur la plage ou alors par forte houle (... mouais, le mot me faisait envie). A la limite, remarquez, pourquoi pas, cela ne serait pas si gênant si l'écriture de la jeune femme, qui livre ses pensées au jour le jour dans son journal intime, ne ressemblait que trop à du mauvais Céline. Comme me disait une prof, ce n'est pas parce que tu mets des points de suspension que tu traduis les hésitations de l'esprit... (ces derniers trois petits points, je les assume); certes Céline pouvait se permettre, mais Dupeyron ne s'arrête point en si bon chemin vu qu'il a également une fâcheuse tendance à faire péter les articles une fois sur deux (j'exagère à peine), à se faire un malade de l'ellipse (ah ouais ce sont des bribes de pensée, oki) et à abuser des point d'exclamation... Ca donne quelque chose du genre (j'ouvre le livre au hasard): "Il me tirait, me traînait dans les escaliers... le tapis usé à la corde... ses pieds nus qui flottaient dans des pantoufles comme le tapis... Et l'odeur!... On entrait dedans!... Une agression! A pas savoir comment se défendre... Ca rentrait de partout... le nez, la gorge, les yeux, les cheveux qui commençaient à me démanger, les oreilles mêmes... " - ad lib. Bref, c'est un peu usant, surtout que je passe mon temps à hurler à mes étudiants qu'un verbe et un sujet c'est quand même un bon début pour faire une phrase (c'est un aparté qui n'a pas grand chose à voir la littérature, ouais, mais Dupeyron m'a un poil agacé). Plus étonnante est la volonté de Dupeyron d'avoir écrit ce livre après avoir réalisé son film. Malheureusement ce flot de mots, s'il parvient à traduire tous les états d'âme de cette personne qui a besoin de régler des comptes avec elle-même, finit par nous submerger, presque par nous noyer - ironie de la chose vu que les personnages principaux flirtent souvent avec la flotte (envie de suicide ou accident). Bon j'en ai vu quand même le bout sans souffrir plus que cela, mais sans prendre un énorme plaisir tout du long, on l'aura compris... trois petits points...