Arnaques, Crimes et Botanique (Lock, Stock and Two smoking Barrels) de Guy Ritchie - 1998
Je suis bien luné ce soir, et je suis prêt à fermer les yeux sur la mise en scène affreuse de ce film. Je suis même prêt à admettre que, pour la première fois depuis 1939 (date du dernier film anglais d'Hitchcock), une production britannique m'a amusé. C'est dire. Lock, Stock and Two Smoking Barrels est une minuscule chose assez fun, dynamique et rigolote, le truc typique d'un samedi soir de printemps, et je dis ça en ayant pleinement conscience qu'on est lundi.
C'est uniquement grâce à son scénario et à ses acteurs que le film tient. On assiste à un imbroglio entre bandes de tueurs autur d'un magot caché, de fusils de collection et de dettes impayées. Très compliquée, l'histoire se resserre avec beaucoup d'esprit autour d'un quatuor de bras cassés, qui deviennent la cible de tout ce qui se fait en matière de tueurs au coeur de Londres. C'est très astucieux, joliment enlevé, et c'est un vrai plaisir de voir comment les gusses vont se tirer des situations inextricables dans lesquelles ils s'enferment. La galerie de personnages, même très caricaturée par des acteurs "à tronche", fait son effet, et on a là toute la palette des incontournables figures de petites frappes, du tueur élégant au débile léger, du psychopate effrayant au big boss sans pitié. C'est clairement l'école Tarantino, Guy Ritchie s'amusant sur les traces du maître à tirer les passages obligés jusqu'au délire, construisant de petits dialogues décalés, brouillant les pistes de la chronologie. Ca arrive bien entendu à peine à la cheville de Pulp Fiction, mais c'est suffisamment inventif pour tenir le suspense jusqu'au bout, et franchement on ne demande pas beaucoup plus. Malgré quelques maladresses d'écriture (notamment le personnage de Sting, qu'on dirait inséré là-dedans à la dernière minute, complètement dans un autre film), on passe un moment poilant et tonique.
Heureusement, parce que côté mise en scène, c'est beaucoup moins inventif. Ritchie balance l'intégralité des effets trop class de ce genre de productions fauchées, arrêts sur image, photo cradouille, visages distordus sous l'effet des focales courtes, musique décalée, voire subitement un unique split-screen qui va à ce film comme une bicyclette à un poisson. C'est moche, très voyant, très crâneur, et c'est à la limite du plagiat, de Tarantino encore, de Danny Boyle et aussi de Robert Rodriguez. On fermera les yeux avec miséricorde sur ce manque de talent de metteur en scène, et on apréciera à sa juste valeur ce petit film que j'aurai oublié demain. Tant mieux : comme ça, je pourrai le revoir.