Café Lumière (Kôhî jikô) (2003) de Hsiao-Hsien Hou
Voilà un film d'une grand zénitude qui convient parfaitement un lendemain de gueule de bois (franchement, Damien on a déconné sur les bières, hier); tant que je suis dans les messages personnels merci en passant à Cléa, ma chtite étudiante, qui m'a déniché quelque part sur internet (trop fort ces Chinois, me rallument ma ptite flamme, moi) ce petit bijou ciselé que je cherchais depuis longtemps.
On pourrait résumer l'intrigue en une ligne: Yôko revient de Taiwan et apprend à ses parents qu'elle est enceinte. Bon voilà, ça c'est fait. Filmé en hommage à Ozu (le centenaire de sa naissance), Hou soigne comme d'habitude avec une parfaite intensité lumineuse ses cadres, son montage étant aussi souple et gracieux que les films du maître; quelques panoramiques, aucun travelling, la caméra reste le plus souvent fixe avec les fameux plans (quasi-) tatami dans l'appartement de Yôko. Les discussions avec ses parents se résument au minimum, sa belle-mère (sa vraie mère, il en sera question plus tard, j'en dis po plus) s'avisant à peine de faire des commentaires lorsqu'elle apprend que Yôko est enceinte, son père restant, lui, totalement muet (ah si vers la fin, il lui file une patate pendant le déjeuner et commente son geste, ouais c'est tout, faut pas vous attendre à des tirades de 3 pages avec Hou). Cette annonce remue à peine la surface d'un verre d'eau, fait apparaître peut-être juste un rictus d'inquiétude dans l'oeil de sa belle-mère, voilà pour le drame (c'est calme comme un cerisier au petit matin, pas un son plus haut que l'autre du début à la fin, ne réveillant pas même ma femme qui dormait sur le canapé (elle dormait DEJA avant le film, ne soyez pas caustique, je vous vois d'ici)). Yôko part sur les traces d'un compositeur taiwanais, son ami Hajime (pas son petit copain, qui, lui, est aussi taiwanais, et que Yôko ne souhaite point épouser, à peine même revoir...) traque lui le son des trains. C'est minimaliste comme tout, genre petite plume de colombe au soleil levant, et l'on découvre peu à peu, au gré d'une magnifique scène d'orage, le sens du rêve de Yôko (dont elle parle au début du film) ou encore, plus comique et de façon inattendue, celui des multiples références aux parapluies.
Yôko et Hajime semblent être nostalgiques d'un temps révolu où ils étaient couvés, protégés par leur mère, mais assument également pleinement leur besoin d'indépendance et de liberté. Leurs chemins ne cessent de se croiser, notamment sur les rails (sublimes plans au niveau du timing (il est chef de gare Hou, po possible autrement) lorsque les deux trains de Yôko et Hajime se croisent et se frôlent) et on se dit qu'ils risquent bien de finir sur le même (rail, vous me suivez ou vous dormez ?). Que dire de plus sinon qu'il faut se laisser totalement bercer par le charme de cette jolie petite chronique nippone filmée avec un très très grand art du cadre. Si vous êtes fan de Stallone, remettez gentiment le Dvd à sa place sur son rayon.