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23 septembre 2014

Marchez joyeusement (Hogaraka ni ayume) (1929) de Yasujiro Ozu

Quitte à paraître un peu trivial, il faut reconnaître qu'il faut avoir une certaine pugnacité pour voir tous les films de Ozu. Déjà, allez savoir pourquoi, les seules copies disponibles sur internet sont des diffusions de la télévision italienne la Rai Tre : donc sous-titrées en italien ; les seuls autres sous-titres que l'on peut trouver sur divers sites sont en espagnol... Ni une, ni deux, j'ai fait traduire ces derniers par mon pote Jean-Phi Davodeau (qu'une statue lui soit dressée) pour regarder ce Ozu dans de parfaites conditions. Ah ouais faut s'accrocher, c'est un véritable métier que d'être fan de Ozu et je fais l'impasse sur tous les petits problèmes techniques, c'est vraiment tortin l'informatique...

walk_cheerfully

Bref revenons-en à l'oeuvre elle-même qui est une sorte de film de gangsters, fortement marquée par l'influence américaine, et qui convie à la fois roucoulade sentimentale et histoire de potes. Un petit malfrat, Kenji, tombe raide dingue de Yazue, une fille qu'il a croisée dans la rue. Cette dernière est courtisée par son patron, mais comme c'est un petit moustachu binoclard, elle l'ignore grave. Kenji retombe sur Yazue "accidentellement", manquant d'écraser en caisse la petite soeur de celle-ci. Il décide pour se faire pardonner de les inviter la semaine suivante à un pique-nique : nos deux héros flirtent au pied d'un Bouddha géant, ce qui constitue sûrement le plus beau cadre du film. La collègue de Yazue, qui est également amoureuse de Kenji, monte un sale coup à cette dernière en lui demandant de se rendre dans un hôtel : elle se retrouve aussitôt enfermée dans la chambre par son boss qui n'a pas l'air d'avoir des idées bien jolies-jolies ; heureusement Kenji veille, se rend à l'hôtel et fout un méga taquet au moustachu, qui valdingue méchamment dans les décors. Mais Yazue lui annonce qu'elle ne peut point vivre avec une petite frappe dans son genre : travelling avant terrible sur le héros qui s'allume sa clope, Kenji vient de prendre la décision de sa vie, il va devenir clean pour elle. Il annonce sa décision de se ranger des voitures à son partenaire de maraude lors d'une séquence qui dure bien deux plombes. Mais c'est crucial, comme tournant, on le comprend bien. Seulement le Kenji va-t-il être capable de revenir sur terre et d'accepter n'importe quel taff, ne risque-t-il point d'être rattrapé par son passé, sa liaison avec Yazue et l'aide de son pote qui a aussi tourné la page vont-ils suffire - ça, pour le savoir, il faut que je vous envoie mes sous-titres.

walkcheerfully

Forte influence américaine, on disait, au niveau du sport (Kenji est un boxeur, des photos tapissent sa chambre et remplacent les traditionnelles affiches de ciné ; il tape aussi dans une balle de golf (hilarant, il frappe comme un dingue) et plusieurs scènes ont des tables de billard en toile de fond), des coiffures louisebrookiennes de plusieurs personnages féminins et des fringues des petites frappes, ou encore dans leur passion pour les bagnoles : Ozu fait d'ailleurs un effort royal pour filmer ces rapides bolides (30 km/heure dans les pentes au moins) et même si son cadre n'est parfois pas parfaitement nickel, on sent qu'il a voulu faire parler la poudre et dynamiser son intrigue, avec ces longs plans en mouvement. Le film est un peu attendu dans sa trame, il faut l'avouer, mais regorge de petits moments ozuesques, comme ces saluts ultra chorégraphiés des malfrats par bandes de 2 ou 5, ou ces gros plans sur les pieds, lors d'une discussion, les deux personnes tapant au même rythme alors qu'elles se mettent d'accord sur un plan. La plus belle petite idée revient sûrement à l'utilisation d'une lumière se reflètant dans un poudrier qui vient taper d'en haut les vêtements de Yazue : elle lève alors la tête et aperçoit Kenji qu'elle avait perdu de vue depuis qu'il avait décidé de changer de vie; ce rayon de lumière hasardeux symbolise le petit coup de baguette magique de leur rencontre. Elle a changé leur destinée, surtout celle de Kenji, qui va devoir assumer pleinement ses choix au nom de l'ammuuurrr. Parmi les films qui nous restent d'Ozu, il s'agit de la première incursion dans le monde des gangsters un peu à la ramasse, et il est clair que ce film baigne dans une certaine ambiance des States ; Ozu semble gagner une certaine confiance au niveau technique (son quatorzième film en trois ans tout de même), multipliant les travellings, fait toujours preuve d'un grand sens du burlesque mais a un peu plus de mal dans les scènes plus intimes, qui pêchent un peu en émotion. Mais petit Ozu deviendra grand, très grand, comme le Bouddha (du film, pas de confusion).   (Shang - 18/04/08)


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Ah oui assez net recul par rapport à ses films précédents. Celui-ci, à cultiver une sorte de noirceur mélodramatique assez convenue, empêche la vie de circuler ; or, Ozu étant le cinéaste de la vie qui circule, voyez mon désarroi. Ne seraient ces petits détails rapportés par mon Shang et cet adorable personnage du sbire-souffre-douleur du héros, le film serait même à deux doigts d'étouffer sous la pesanteur moraliste de sa trame et de son univers. Pour l'instant, Ozu a un peu de mal à filmer les femmes, lui préférant de toute évidence de grandes thématiques masculines comme la camaraderie, le gang, ce genre de choses. Ses deux héroïnes, qu'il voudrait voir comme les deux côtés de la médaille, l'une noire et cupide, l'autre lumineuse et sage, sont assez palotes et très caricaturales. A tout prendre, on préfère la sexuée biatch qui veut entraîner notre héros sur la mauvaise pente à cette icône de bien-pensance qui s'excuse à toutes les phrases (le film est très chargé en intertitres, qui commencent tous par "Je suis désolé(e)", à moins que ce soit la traduction du copain de Shang qui déconne (oui, les sous-titres sont en vente libre depuis la critique de mon camarade)). Peu de choses à se mettre sous la dent dans la trame, et Shang a un peu fait le tour des quelques jolies idées de mise en scène. Notons en supplément, tout de même, quelques mouvements de caméra assez vertigineux et surprenants, comme ce très beau travelling latéral qui tourne autour d'un trio en train de se menacer dans la rue. Bien aimé aussi cette première séquence presque expérimentale, où un homme est poursuivi dans la rue par un groupe de gars, dans une succession de plans à la Buster Keaton assez effrayants. Bref, on sent que Ozu essaye des trucs ; il garde le réussi comme le raté, certes (ces plans chaotiques en bagnole), mais c'est tout à son honneur. Mais c'est vrai : un tout petit Ozu, qui, je le confirme, deviendra grand.   (Gols - 23/09/14)

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Commentaires
A
Allez, je reconnais que c'était pas très fin... C'est parce que j'ai eu honte d'être resté bloqué un long moment devant cette image en croyant que la boule allait finir par partir !
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G
J'aime ce sens de la mesure, Alfio, qui apparaît à travers votre avis nuancé et argumenté qui vous honore, eheh.
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A
Sympa de mettre le film dans son intégralité sur la dernière image, mais qu'est-ce que c'est chiant le cinéma japonais !
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