L'Homme sans frontière (The Hired Hand) (1971) de Peter Fonda
Oulala, terrible comme ce film a mal vieilli dans son esthétisme. J'ai plus d'une fois serré des dents devant ces arrêts sur images, ces ralentis faussement poétiques, ou ces séquences en transparence qui superposent deux plans. Sur un coucher de soleil ça donne, au mieux, une pub Malboro, sur des images de vies rurales ça donne, au pire, des images de fond d'écran de karaoke chinois. Certes le psychédélisme de l'époque semble imposer sa marque, mais cela semble terriblement dépassé et facile aujourd'hui. Et je passe sur une petite fille blonde qui court dans la prairie enchaînée avec un Peter Fonda qui va forcément couper du bois, on se croirait chez les Ingels. L'histoire, quant à elle, de cet homme qui après avoir parcouru des kilomètres et des kilomètres à cheval depuis sept ans, avec le même pote, décide de revenir au bercail et de retrouver sa femme, aurait pu être intéressante. Peter Fonda (cette fois j'ai bon), auréolé du succès d'Easy Rider réalise son premier film, et troque les Harley pour des chevaux sans vapeur - ou presque. Après des années d'errance, cet homme, marié trop jeune, veut faire le deuil de ses envies de voyages et de cette forte promiscuité masculine, pour revenir sérieusement s'occuper de sa femme et de son bambin, s'installer quoi. On sent bien que le vrai sujet du film est le choix entre les virées sans fin entre potes et l'amour conjugal : cet homme sans frontière du titre français - assez bien trouvé pour une fois - n'est pas tant à entendre au niveau géographique qu'au niveau de la séparation entre amour et amitié; lorsqu'il se doit de faire un choix capital, l'homme se retrouve en face de sa destinée. Malheureusement ce thème abordé lors de trop rares discussions n'est traité que de façon superficielle, et plutôt que de trancher entre les deux, le film s'en tire avec une pirouette scénaristique qui laisse le sujet en suspend. L'idée profonde du film est de ce fait à peine esquissée, et comme le rythme lui-même est assez lénifiant, on a vraiment du mal à se laisser embarquer dans cette aventure humaine. Dommage tant l'idée de départ, dans ce genre de film, était finalement relativement originale.