Le Père du Soldat (Djariskatsis mama) (1964) de Rezo Chkheidze
Encore une histoire de Russes attaqués par les Boches pendant la deuxième guerre mondiale, sous l'angle cette fois-ci d'un père géorgien, véritable figure hirsute qui sent bon sa campagne, qui part à la recherche de son fils. Après une première partie qui traîne un peu les pieds, quelques moments d'éclat et une fin à finir un casier de vodka cul-sec devant un tel drame.
Giorgi Makharashvili s'est mis en tête d'aller visiter son fils; après un très très long voyage (carriole, train, re-carriole, marche forcée ("Tu as de bonnes jambes, mon gars, lui dit le conducteur de carriole, tu devrais partir à la guerre!; "Ce sont des jeunes comme toi qui devraient s'engager", lui répond le vieux, un poil piqué au vif et qui ne se démonte point... et quelques plans suivant on se rend compte... que le conducteur est cul-de-jatte. Ouais la bourde, quoi), c'est pas un petit docteur qui va arrêter le Giorgi en lui disant que son fils à déjà repris le chemin du front; le vieux part bille en tête dans les couloirs de l'hôpital mais c'est un fait... Il apprend malgré tout au passage par des compagnons de route de son fils où celui-ci se trouve, à savoir à quelques 2 heures en train, près du front, et la montagne poilue géorgienne de se mettre en route. Po de trace de son fils une fois arrivé et rapidement, à la place, on assiste à un déferlement d'Allemands. Le vieux ne se démonte pas et après avoir secouru un soldat blessé, et pêté la tête à un Allemand en combat frontal, il est accepté dans les rangs de l'armée. Il reste digne aux côtés des petits jeunes, ne tremblant jamais sous les bombes, et toujours là pour prendre son temps pour estimer la qualité d'un sol ou pour redresser, lors de leur contre-attaque, le panneau de la frontière russe. Le seul truc qu'il ne supporte pas c'est quand un de ses propres tanks écrase une plantation de vigne allemande: le vieux de foutre une baffasse au soldat conducteur du tank qui l'envoie à trois rangées de là, en lui expliquant que si les Allemands ont ravagé leur pays, c'est pas une raison pour faire pareil: c'est là toute la différence entre les fascistes et eux (on entend voler les mouches). Il enfonce le clou en lui disant qu'il est trop jeune pour avoir jamais planté un arbre et le soldat fait vraiment une ptite mine. Lors d'un combat final, arrivé au rez-de-chaussée d'un immeuble occupé par les Allemands, il bavardera quelques secondes avec son fils bloqué au troisième étage; le vieux mènera l'attaque final en brave gaillard... mais arggggg, trop tard, il trouve son fils mortellement blessé. Là c'est bien simple, on est dans une tragédie cosmique; mais le vieux reste stoïque en fermant les yeux de son fils; il est fier de lui car il a ouvert le passage de cette voie avec son tank comme le rappelle des inscriptions ça et là. A gagné la guerre mais perdu son fils pour la patrie, mouais, pas forcément récompensé.
Le caractère bourru et la pugnacité de ce père permettent au film de rester sur les rails et s'il n'y a pas un vrai génie dans la mise en scène ou les cadres, comme chez certains de ses pairs, Chkheidze réalise un film avec une fin qui transcende les quelques moments creux.