Répétition d'Orchestre (Prova d'orchestra) (1978) de Federico Fellini
Ultime collaboration Rota/Fellini, une véritable apothéose, un grand bordel organisé par le Maestro.
Tout commence de la façon la plus paisible possible dans cette salle aux pupitres bien en ordre. Visite guidée de lieux dans le recueillement, puis arrivée des musiciens -accompagnés d'un membre du syndicat- et après quelques hésitations à parler à l'équipe télé, chacun y va de son anecdote sur son fidèle compagnon, pardon instrument, dans une furia verbale fellinienne... Il y a bien sùr un violoniste qui reste l'oreille collée à son poste de radio pour suivre le foot, un "professeur" ultra-centenaire, des femmes déchaînées ou alanguies, bref, une vraie troupe de théâtre ou de cirque, on ne parvient pas vraiment à faire la différence. Arrive alors le chef d'Orchestre qui exprime son plaisir "à mettre les gens ensemble, à construire quelque chose"... Mais rapidement, la musique déraille et l'orchestre se met peu à peu à conspuer ce maître plus que dictatorial aux étranges accents allemands (auto-critique du maestro ou simple jeu?)... Et là fusil, c'est la débandade la plus totale, rebellion, révolte, explosion totale, les murs se trouvent tagués à mort, des slogans sont scandés, on remplace même le "conductore" par un métronome géant, objet monolithique noir tout droit sorti de 2001, l'Odyssé de l'espace. Pas le temps de se prosterner que cette immense idole est descendue de son piédestal alors que résonent d'étranges coups de boutoirs sur les murs... Dans la folie générale - et une gentille scène d'amour sous le piano - une énorme boule vient exploser le mur... Le calme revient, le maestro reprend les commandes et la direction dans une brume chère au maître, la musique étant perçue comme "salvatrice" - ce qui n'empêche pas le chef d'orchestre de beugler ses commentaires jusqu'au générique final. 1h10 de concentré que l'on peut aussi bien prendre comme un hommage à la musique qu'à la difficulté de créer, sur un fond social exarcébé - on regretterait presque parfois les années 70. Maestro, chapo bas.