Un été inoubliable (1994) de Lucian Pintilie
On peut venir me chauffer avec Vertov, mais pas avec Lucian Pintilie. Ca c'est dit.
Il se dégage dans toute son oeuvre à la fois une certaine violence (physique ou mentale), une causticité et un humour pointu mais aussi une dimension humaine toujours remarquables. Pintilié ne juge pas, ne cherche pas à démontrer mais il montre tout simplement et c'est encore ce qu'il y a de plus dur. Un été inoubliable ne déroge pas à la règle traitant à la fois des complexités éthniques, de la connerie militaire (c'est pas un jugement, on s'entend bien, c'est un fait) et des rapports au sein d'une famille.
La femme d'un militaire (Kristin Scott Thomas, trés sobre) en s'attachant aux prisonniers-otages, dans cette partie occupée par la Roumanie à la frontière avec la Bulgarie, va mettre en porte-à-faux son mari lorsque l'ordre est donné de les fusiller, en réponse aux huit soldats assassinés par les rebelles. Celui-ci au tempérament qualifié de germanique, sévère mais juste, se voit contraint de faire un choix: abandonner toute idée de carrière ou perdre tout respect aux yeux de sa femme. Humilié par sa hiérarchie, il tentera de se suicider. Mais laissera à d'autres cette tache absurde.
Avec une grande parcimonie, Pintilié parvient à la fois à nous montrer les relations hiérarchiques et les relations familiales (trois mignons bambins sont aussi de la partie) nous rendant ainsi chaque élément le plus proche possible. A l'image du titre, volontairement ironique, cet été inoubliable ne l'est pas, pour l'un des bambins qui narre cette histoire, grâce à de jolis souvenirs édulcorés mais plutôt à cause des décisions et de la violence auxquelles il a assisté pendant cette saison. Cette recherche du temps perdu (la femme lit Albertine disparue) n'est en aucune façon une quête temporelle mais plutôt celle d'une perte d'innocence. Une fois de plus Pintilie touche dans le mille.
C'est qui l'homme à la caméra, hein?!