L'aube (1933) (Tian Ming) de Yu Sun
Ah mes enfants, voici un bon vieux film muet chinois teinté d'aspects artististiques non dénués d'intérêt mais qui s'embourbe dans un aspect révolutionnaire dont il aurait bien pu se passer.
Lingling et son cousin quittent comme beaucoup d'autres la campagne pour venir à LA ville: SHANGRRRAI. Le flux des nouveaux arrivants est comparé en surimpression à une benne qu'on déverse et on se croirait dans Les Temps modernes de Chaplin où la sortie du métro est comparée à un troupeau de moutons. Ca s'annonce bien. Ils sont recueillis par d'autres cousins qui se moquent de leur tenue de bouseux de façon un peu grinçante. Ils sont logés dans des chambres de bonnes mais ils sont contents. Ils visitent un Shanghai déjà trépident mais moins pollué et ils sont contents (de biens belles vues sur le pont du jardin Yu Yuan et sur le Bund by night qui font chaud au coeur). Ils vont travailler à l'usine transportés dans des pousse-pousse brouettes, ils en chient et ils sont toujours contents.
Mais il y a les méchants exploiteurs. Nos héros résistent contre le contre-maître (le Chinois de la campagne est fier) et tout ce qu'ils gagneront c'est de perdre leur taff. Lui, il finira dans les cales d'un bateau à charger le charbon (mais il est content), elle, après quelques péripéties, sur le trottoir. Lorsqu'elle revient un soir et trouve son collier campagnard en graines de lotus (je suis pas super fort en biologie, il faut pas me croire sur parole), on a droit à un fabuleux flash-back où on retrouve nos deux héros lors de leur partie de campagne sur des barques naviguant entre de grosses feuilles de lotus. L'image en surimpression de notre héroïne couchée dans la barque puis couchée dans son lit est de toute beauté. Lui, il est quand même vénère et s'engage dans l'armée révolutionnaire de Canton. Elle aussi, après quelques tentatives de viols, semble vouloir se rebeller (le poing en l'air façon black power) mais on la retrouve quelques mois plus tard en belle gourgandine pour ne pas dire en sacré gougniafière autour d'une table où à force d'oeillades, de petits coups de pieds sous la table et de mains posés sur les genoux elle réussit à flirter avec cinq hommes à la fois... Toutes les mêmes! Et ben pas du tout en fait car tout l'argent qu'elle gagne, elle le donne à des familles pauvres qui ont plein de petits nenfants pauvres.
Un jour, sur les quais, nos deux héros se retrouvent et il lui apprend que la révolution va bientôt arriver à Shanghai et qu'il est là en émissaire. Ils sont super contents. Mais l'armée encercle la maison, il s'échappe, et elle, montée sur la table à croiser ses jambes très haut pour découvrir ses bas résille (Sacré Li Lili - si si c'est bien son nom) parvient bien à capter l'attention des soldats pour un temps mais un petit bout de papier laissé par son cousin la trahit. Elle sera condamnée à mort. Là, on tombe dans du gros lourd quand, dans ses habits de paysanne, sous les fusils des soldats, elle demande qu'on la tue quand elle fera son plus beau sourire... En plus, le jeune capitaine prend son parti ("Oui résistons contre les oppresseurs du monde entier et surtout Nicolas Sarkozy" lance-t-il même si mon chinois n'est pas excellent en retournant son pistolet contre un général). Il se fait abattre à ses pieds et elle, pas troublée, dit qu'un sacrifice de plus ou de moins c'est pas grave car la révolution triomphera bientôt! Ouaiiiiiiis!... Et de se faire descendre à l'aube, d'où le titre.
Dommage de finir sur cette note engagée car Yu Sun sans être à la hauteur de L'Aurore de Murnau (1927... s'en est-il inspiré le bougre???) nous montre de belles choses. Pas toujours facile d'être patriote et de faire du ciné.