Walk the line de James Mangold - 2005
Pourquoi en France on n’est pas capable de faire des biopics ? Je rêve d’un film sur Michel Sardou qui pourrait s’appeler –on n’est pas obligé d’être d’accord, c’est juste une piste - « Le lac du Conemara ». Quoi ? C’est pas plus con que de demander à Jean-Claude Brisseau de faire « La marche de l’Empereur 2 ». Ah ben là quand même, on serait sûr. Ah si, quand même.
Walk the line est un film honnête. Alors oui c’est vrai que c’est une version cocash-cola. C’est d’ailleurs ça le plus ironique quand, vers la fin du film, le chef de la prison n’avoue jamais avoir bu l’eau jaune du pénitencier et préfère le Coca et que Johnny Cash le raille (de c…, non pas celle-là). Il fallait faire un film beaucoup plus trouble sur l’homme en noir… mais bon. Et puis, c’est vrai qu’il y en a aussi ras le cul de ces montages à l’américaine où on commence par un trauma d’enfance (en l’occurrence ici la mort de son frère) qui est comme un besoin de vouloir toujours TOUT expliquer, ou pire tout excuser (alors la drogue, c’est pas bien, c’est sûr mais vous comprenez…). Elle est où la part de magie dans la création, cette part de Dieu comme dirait Gide (pas facile de placer Gide sur Johnny Cash… vous me faites marrer, j’ai pas les moyens de vous faire un dossier comme les Inrocks sur l’influence musicale du type alors que j’écoute TOTO… Quoi ?), ils vont bientôt finir par nous foutre les ingrédients de la recette au dos des jaquettes. Et je ne me suis pas encore tapé la vie de Capote ce qui s’annonce d’ores et déjà comme plutôt hygiènique. Ok je me calme.
Alors l’histoire : Jonny Cash est représentant mais il est aussi mauvais que B…..n pour vendre sa cam. Sa femme gueule, qui va ramener la thune ?… et pis miracle : première audition, premier gros chèque (get the joke ?). Le reste j’ai plus de jeux de mots.
La seule réussite réelle est le duo d’acteurs, il faut l’admettre, avec quelques scènes qui sonnent vraiment juste : le premier baiser refusé, le premier lendemain amoureux avec les cacahouètes (oui là faut imaginer) et surtout la dernière séquence sur scène où Johnny and June devant le public discutent de… bah vous verrez bien. J’en verse encore une petite larme sur le clavier. C’est clair que la chtite Witherspoon qui nous gratifie d’une première scène bettyboopsienne n’aura pas volé son Oscar. Mais bon, peut-on encore gagner quand on est juste maquillé ? A voir. (Shang - 28/02/06)
Même si je suis dans les grandes lignes tout à fait d'accord avec mon éminent correspondant shangaien, j'ajoute mon grain de sel. Non seulement parce que j'ose dire que je connais mieux Cash que Toto (les 3 derniers albums de Cash sont des merveilles inter-sidérales), mais aussi parce qu'on a dit qu'on écrirait sur tous les films qu'on voit.
Ma réaction sera celle-ci : ne confiez surtout pas un marteau à James Mangold : ce type construit une jolie petite chose fragile, sensible et inspirée pendant 1 heure pour la détruire entièrement tout de suite après. La première partie de Walk the line est vraiment très agréable. D'abord pour la musique (dommage qu'on n'entende pas de morceaux des 3 derniers albums de Cash, qui sont des merveilles inter-sidérales), mais aussi pour les acteurs (à fond d'accord pour admirer sans réserve Witherspoon), pour la complicité totale qu'il y a entre eux dans les scènes musicales. Et puis, encore plus admirable, il me semble que Mangold surfe très bien entre les scènes obligées : Cash est un mec normal, qui ne galère pas particulièrement pour se faire connaître, qui n'a pas une musique ou un jeu de scène particulièrement novateurs (bien vue, la présence de Jerry Lee Lewis), relativement fidèle et bon garçon. On se dit qu'enfin, on va avoir droit à un film sur un mec comme les autres, qui ne mérite un film que grâce à sa musique, à sa présence. D'accord, il y a ces scènes du début, avec son frère, qui sont un peu archi-vues. Mais je m'y suis laissé prendre, un peu comme à une lecture de Tom Sawyer.
Mais... hélas et cacaprout : sitôt que ce fragile équilibre est mis en place, boum, on tombe dans la descente aux enfers, dans "le-génie-qui-bat-sa-femme", dans "le-génie-qui-gâche-son-talent-dans-la-drogue", etc etc. Et là, c'est la molle routine de la biographie. Et on se fait chier sa race. Alors, c'est un chouille mieux qu'Aviator parce que moins lourd, plus subtil dans l'admiration, et parce qu'il y a la musique (dommage toutefois qu'on n'entende pas de morceaux des 3 derniers albums de Cash, qui sont des merveilles inter-sidérales), mais le mal est aussi important. Effectivement, on peut être un brillant artiste sans avoir eu un destin comme ça, inutile de charger tout ça comme un baudet.
Plus que de Michel Sardou, je rêve d'une biographie, je sais pas, de Pierre Mondy, tiens. Pour voir si on peut vraiment dresser le portrait d'un homme normal. Relisons L'Homme sans caractère, ami chinois, mmm ? Et écoutons la merveille inter-sidérale qu'est Solitary Man, une des dernières chansons de Cash. (Gols - 02/03/06)