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6 octobre 2025

Un simple Accident (یک تصادف ساده,) de Jafar Panahi - 2025

Retour aux affaires pour Gols : je comprends votre attente fiévreuse, me revoilà. Et me revoilà par la plus glorieuse des portes : le Panahi nouveau est arrivé. Il nous revient avec des armes beaucoup plus massives qu'à son ordinaire : Un simple accident est frontal, agressif, colérique, là où le maître avait su me convaincre jadis par la grande intelligence et la grande subtilité de son propos et de sa mise en scène. On ne saurait le lui reprocher, tant sa situation dans son pays est critique, et tant l'urgence de dénoncer doit nécessairement l'habiter. N'empêche : voici peut-être un des films les moins subtils de son auteur, en tout cas celui qui rend le moins justice à sa profonde intelligence. Point d'allégorie, point d'exigence du spectateur ici : l'histoire raconte tout droit, et si on perd en pouvoir d'interprétation, on gagne indéniablement en netteté. Un homme est persuadé d'avoir retrouvé son bourreau, celui qui le tortura jadis dans les geôles islamistes, qu'il n'a jamais vu mais qu'il pense reconnaître au grincement que fait sa prothèse de jambe. Ni une ni deux, il kidnappe l'homme, bien décidé à lui faire payer ses exactions. Mais devant les dénégations de son otage, un doute lui vient : et s'il se trompait ? si ce n'était pas le bon homme ? Le voilà parti pour une petite odyssée sur la trace d'autres malheureux ayant eu affaire à "La Guibole", histoire de confirmer ses doutes. Mais au fur et à mesure que le temps passe, sa soif de vengeance devient moins forte : peut-être n'est-il pas un tueur, un tortionnaire comme celui qu'il tient entre ses mains ; peut-être aussi la bienveillance, la gentillesse, la bonté, la générosité, sont-elles des armes tout aussi fortes que la torture pour parvenir à ses fins. 

On sait que Panahi tourne ses films clandestinement en Iran. Entièrement pris dans le huis-clos du van ou dans des petits coins de rue désertes, ce film est pourtant un de ceux qui sont les plus à ciel ouvert de sa filmographie. Sans aller jusqu'à se mêler à la foule, on dirait que Panahi, à travers son échantillon d'êtres humains tous investis d'un lourd passé, prend le pouls de son peuple, tente un plan en coupe de l'état actuel de la société en Iran. Tout à la fois burlesque et tragique, ce voyage entraine avec lui une bande de Pieds Nickelés, tous symboliques d'un état d'esprit face à cette situation : un s'énerve tout de suite, l'autre se veut réfléchie, un est plutôt dépassé, un ne veut pas en entendre parler... Dans de longs plans-séquence (le filmage est très sobre, sans les mille idées habituelles chez Panahi), le cinéaste scrute ces dilemmes intérieurs qui rongent les personnages, et les acteurs sont au diapason pour induire ces questions morales capitales. Autant dans les dialogues que dans la distance que la caméra installe par rapport aux comédiens, il est toujours juste, toujours à la bonne place, refusant le mélodrame ou la tragédie pour filmer de simples gens face à une situation qui les dépasse. Un simple accident emprunte autant au thriller qu'au pamphlet politique, à la comédie qu'au conte. Peut-être y manque-t-il un vrai geste de cinéma, un de ceux que Panahi avait trouvé dans Trois Visages ou Taxi Téhéran. Ici, il raconte le plus simplement et clairement possible son édifiante histoire, certes passionnante et captivante. Il nous captive dans son récit, moins dans sa mise en scène. Malgré tout, voilà un cinéma engagé, courageux au-delà de tout, un vrai acte de militant qui est aussi un beau moment d'émotion. (Gols 03/10/25)

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Ah je reconnais bien là l'ami Gols qui préfère souvent les films avec des zones "floues", les métaphores obtuses, aux récits trop explicites, aux effets trop nets, trop voyants (ceci dit, c'est un peu ma réserve personnelle pour Sirat - notre prochaine discussion sur ces deux films-là risque d'être fatale à un fut de bière, : chacun ne pouvant, imaginé-je déjà, démordre de sa position avant de rouler sous la table et d'oublier le fond de la discussion). Certes, il faut bien reconnaître que Panahi, sous l'emprise forcément de ses quelques semaines d'expérience en prison, a plutôt tendance à vouloir aller droit au but sans sûrement vouloir s'emmerder avec une quelconque dimension pseudo poético-lyrique. Il choisit tout de même, pour évoquer cette situation politique dure et les tortionnaires de son pays, de passer insidieusement par la case "comédie" : cela permet de donner au film de vraies bouffées d'air, de ne pas tomber dans une atmosphère lourde, pesante, plombante... Après le coup d'éclat (et de pelle) de notre héros sur celui qu'il considère depuis des années comme son ennemi juré (qui lui a fait tout perdre, d'un point de vue sentimental et physique), vient le temps de la tergiversation, du doute et la folle équipée sauvage... Sa recherche de témoins (victimes du même agresseur) va lui permettre de faire des rencontres des plus diverses, chacun ayant à son niveau pâti de cet enfoiré de tortionnaire. Si le ton n'est pas à la rigolade (certains ne veulent guère réfléchir avant d'en découdre et massacrer ce salaud), les situations elles-mêmes (la promiscuité difficile dans le van, la panne du camion, la présence soudaine de deux gardiens de sécurité, l'épisode tout autant imprévu dans la maternité...) vont permettre à chacun de confronter son propre avis, son propre ressenti aux autres... donnant ainsi à chacun, par la force des choses, le temps de la réflexion et la possibilité éventuelle de faire preuve d'humanisme - ou de barbarie (certaines colères pouvant, se dit-on, difficilement s'apaiser...). Le scénario, très intelligemment troussé, va permettre à chacun de suivre son propre chemin de la colère à la raison ou de la colère à la violence (à la raison ? A voir). Panahi livre quelques moments très forts lors de plans-séquences somptueux, aussi bien lorsque l'ensemble de la petite troupe se retrouve à cogiter dans le désert que lorsque le tortionnaire, attaché à un arbre, est poussé dans ses derniers retranchements. Panahi joue avec finesse des moments qui alternent décompression totale et tension maximum tirant ainsi le meilleur parti de ce scénario qui nous laisse sur la brèche jusqu'à la dernière image, jusqu'au dernier bruit... Plus qu'un simple film de Panahi, m'est avis : un film, comme un accident, plus frontal mais tout aussi malicieux dans la forme et dans le fond. (Shang 06/10/25)

Quand Cannes, 

Commentaires
C
La version iranienne de "Haitian Corner" de Raoul Peck ?
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