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16 octobre 2025

LIVRE : Dolores de Philippe Djian - 2025

Si vous avez réussi l'exploit de continuer à être bienveillant avec les livres de Djian, à trouver encore une qualité ou deux à ses derniers titres, ce Dolores devrait quand même venir à bout de votre amour immodéré et de mauvaise foi pour l'ex-rebelle de la littérature française. Car non seulement ce nouveau roman envoie toute tentative de trame se faire cuire un œuf, cette fois-ci avec un peu trop de posture pour être vraiment sincère, mais en plus même le style, parangon affiché de cet auteur, fait ici cruellement défaut. La concision des phrases, cette épure recherchée depuis toujours pour tenter de ressembler à Carver, se transforme ici en clichés et en phrases toutes faites, si bien qu'on a un peu l'impression, dans les notations météorologiques notamment (la passion de Djian), qu'une intelligence artificielle a été convoquée. Comment expliquer sinon ces "La nuit était glacée, l'air piquait comme chargé d'étincelles" et autres "Rose déploya un éventail et s'éventa" ? On voit bien, que le gars cherche l'or caché dans la simplicité des phrases, cherche le Graal en alignant des phrases toutes faites, souvent expressions populaires banales, cherche à pulvériser la langue en l'utilisant comme une partition presque privée de sens ou de vraisemblance (qui parle comme dans les romans de Djian ? à part Shang des fois) ; mais dans ce livre en particulier, il est complètement à côté de la plaque : on est face à une indigence totale de la langue, qui ne veut plus rien dire, veut seulement sonner (et encore, mal). Djian a perdu son mojo il y a 35 ans, ne nous voilons pas la face. Mais il n'avait pour l'instant que peu servi de livres totalement indigents (si ce ne sont les derniers, parus tous chez Julliard). C'est chose faite. On n'éprouve du coup aucun intérêt pour cette vague histoire de jeune homme qui tombe amoureux d'une fille de passage, celle-ci étant déjà maquée. Il y a l'habituel catalogue de mères-vamp se promenant en peignoir entrouvert, de rival amoureux cons comme des pneus, de filles fatales et inatteignables, de corps cassés et de morts violentes, d'arrachages de cheveux et d'anathèmes aux dieux au moindre cheveu perdu, mais rien n'y fait : on s'en fout, et Djian aurait pu écrire l'inverse, ou raconter l'histoire de ce Greg 15 jours avant ou 30 ans après, ça aurait été le même livre. Les personnages n'ont même plus l'aspect cool qu'ils avaient du temps d'Echine, ou même d'Impuretés. Ils sont devenus, l'âge aidant, aigris, peu sympathiques, fragiles comme des petites choses, asexués, sans âme, sans épaisseur. Et les 200 pauvres pages qui décrivent leurs activités sont aussi consistantes qu'un verre d'eau. Misère ! (Gols 16/10/25)

 

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C'est vrai qu'on attend plus grand chose de l'ami Djian et qu'on entame ce trente-quatrième ouvrage du sieur, en se disant qu'on ne pourra pas nous reprocher de ne pas l'avoir lu jusqu'à la lie. Et puis, et puis, chemin faisant, malgré ces formules toutes faites qu'il nous sert depuis une trentaine d'ouvrages (c'est un peu devenu sa marque de fabrique, quand même, au fil du temps), malgré ces personnages secondaires interchangeables d'un livre l'autre (qui changent à peine de prénom d'ailleurs ; seule nouveauté, Richard, le père mort du héros, revient sous forme de fantôme : Djian verse dans le fantastique, diable !), on retrouve en ce bon Greg, le piètre héros de ce livre, l'un des doubles légendaires de l'auteur : le type qui ne peut prétendre à rien, qui, contrairement à Gols, ne pense pas que tout ce qu'il dit est la vérité brute (match nul), qui sait d'avance qu'il va en chier des ronds de chapeau avant de tout perdre, est bougrement attachant ; diminué physiquement (une jambe en moins), aussi confiant en lui-même qu'un moule s'apprêtant à traverser le désert, doutant de tout ce qu'il peut encore attendre de la vie, professionnellement, sentimentalement, familialement, il fait donc la connerie ultime, celle de se risquer à tomber amoureux. En se concentrant sur cette histoire d'amour qui ne peut jamais dire son nom entre Greg et cette Dolorès tombée du ciel, Djian nous replonge dans les sempiternelles vagues à l'âme et turpitudes morales du héros purement Djiannesque et c'est encore ce qu'il sait faire de mieux. Il ne s'emmerde quasiment plus avec les descriptions, livre deux trois annotations sur la couleur du ciel ou la force du vent pour simplement amuser la galerie, et, à l'aide de ces sentences qui, quoiqu'en dise mon comparse, gardent un certain sens du rythme, parvient encore à nous faire lire la chose quasiment d'une traite (on a en effet bien du mal à s'arrêter dans la lecture une fois qu'on est lancé - et je ne parle de ces maudits élèves censés faire leur taff en autonomie, élèves qui ne peuvent s'empêcher de poser des questions alors même qu'ils voient bien que tu es occupé, bon sang). Alors bon, je me fais un peu l'avocat du diable, je le sais, d'autant qu'on sent que le Djian est définitivement passé à la vitesse inférieure en livrant dorénavant des bouquins guère plus longs que Oui-Oui dans la collection rose (lui qui se vantait d'écrire une page par jour, il n'écrit plus qu'un paragraphe au quotidien, non ?) et en bâclant quelque peu nonchalamment la fin... Mais bon, contrairement à ses dix derniers bouquin plus ou moins au ras des pâquerettes, j'ai presque senti ici un regain de foi et d'énergie du Philippe ("Et le moindre souffle d'espoir tombant du ciel n'[est] pas négligeable") comme s'il avait enfin pris un certain plaisir à conter les mésaventures de ce personnage totalement dépassé par sa propre vie et par cet amour sans cesse contrarié - alors même que le monde alentours tourne lui-même au chaos. On s'en contentera. (Shang 16/10/25)

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