Partir un Jour (2025) de Amélie Bonnin
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Une ouverture cannoise sous le signe assez guilleret de la petite comédie romantique française chantée qui, à défaut d'ouvrir des débats sur la modernité (qu'il s'agisse de style ou de l'actualité), propose une charmante petite vision de la vie en province et de l'éternelle nostalgie des amours passées. Il fut intéressant de découvrir le court-métrage précédent de Bonnin, pour voir la façon maline dont elle a su développer son sujet et reprendre (avec parfois une subtile variation) certains des épisodes de son court. Ce n'est plus un garçon écrivain qui revient en ses terres normandes mais une jeune fille restauratrice sortie de top chef (l'écriture et les hommes, la cuisine et les femmes - ça va, j'ai encore rien dit) qui retourne, suite à l'infarctus de son pater, en sa contrée alsacienne. Une femme comme héroïne, c'est sûrement plus dans l'air du temps : un léger changement de perspective, donc, même si, au final, on renoue, avec un certain entrain, le même petit couple "reformé" du court Armanet / Bouillon.
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On retrouve le même charme de la trame : un amour de jeunesse avorté devenu une sorte d'acte manqué ; même si chacun a refait sa vie (elle sur Paris avec son compagnon dont elle vient de tomber enceinte, lui dans son bled avec femme et enfant), que reste-t-il de nos amours, de ces beaux jours etc etc... ? On a compris le principe, celui de retrouvailles un peu maladroites, mais des retrouvailles durant lesquelles nos deux protagonistes vont tester la vigueur (ou pas) de leurs sentiments ensommeillés ; comme une chanson vintage populaire capable de réveiller des souvenirs de feu (mettez Hexagone et vous verrez l'impassible Gols partir dans un break dance foudroyant sur le dance floor ; sur Les Lacs du Connemara, il est capable de partir en chenille en solo), nos deux anciens amants, en réveillant certains souvenirs, vont (presque malgré eux ?) glisser sur la pente du désir... Dans un esprit plus bon camarade et bon enfant, à tout prendre, que résolument passionné. Tout cela - chansons populaires assez inattendues susurrées, famille de province geignarde et butée mais pas méchante, implacable nostalgie de sa jeunesse folle et chiante - est rendu de façon pour le moins sympathique par une jeune réalisatrice qui, tout en reprenant son canevas de départ, a su glisser suffisamment de variations pour nous surprendre (merveilleuse intro de la chanson de Cabrel... je n'en dis pas plus...). C'est vrai que parfois, cette image un peu terne, cette vie de province un rien morose où la vie semble s'être arrêtée (tu enlèves les portables, tu es encore dans les années 80 ou 90) frôlent parfois un peu le cliché (le retour des femmes en cuisine ne pouvant que paraître satisfaisant pour les anti-wokistes), et que cette mise en scène guère inventive peut par ailleurs paraître un peu au ras des pâquerettes. Mais le ton enjoué du film, la vivacité des acteurs, le choix rigolo des chansons, font que l'on quitte la chose en étant assez ragaillardi et plutôt amusé par la chose (surtout après avoir buté la grand-mère qui a fait des commentaires tout au long du film : c'est pour quand les projections cinéma dans les ehpad qu'on puisse voir un film sans entendre grincer un dentier ? pardon, je me calme). Une ouverture de Cannes sans prétention mais avec une histoire d'amour resté dans les sabots et un petit humour frenchy de bon aloi. Du bon, du bonnin. (Shang - 14/05/25)
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J'ai attendu quelques jours que ma colère retombe suite à la vision de ce pauvre film transparent. Elle est tombée, et il ne m'en reste finalement que l'impression d'un pauvre film transparent. Scénario minuscule, enjeux aussi captivants que le quart de finale de hockey sur gazon de Romorantin, dramaturgie dans les chaussettes, photo à faire vomir mon chat, fond putassier et racoleur : bienvenue dans le cinéma français 2.0, dans ce genre de machin pour midinettes rose bonbon et chic à découper dans les pages de mode, qui se donne des faux airs de nostalgie rance pour rassembler les spectateurs, et qui adopte un ton œcuménique parfaitement insupportable pour faire des entrées. Qu'est-ce que ce truc raconte ? Le retour au pays, le temps de quelques jours, d'une fille qui a "réussi" (elle a gagné Top Chef, on a vu plus ambitieux), et qui retrouve les émotions et les protagonistes de son adolescence. Les personnages entrent dans le film exactement comme ils en sortiront, sans avoir changé d'un pouce, en ayant traversé cette historiette à trois sous qui ne contient aucune progression, aucun but, aucun fond ; et nous pauvres spectateurs on ressortira pareillement de la salle : dans le même état que quand on est entré, mais ayant subi entre temps un téléfilm pseudo-romantique pour femme seule. Bonnin enfile les saynètes façon perles sur un collier, affichant des personnages clicheteux (les parents, les copains d'enfance) et les situations convenues, flirtant parfois avec la "dystopie à l'envers" façon Peggie Sue got married, parfois avec la bulle télé à la Canal+, parfois avec la mélancolie de fille à la mode. Il en résulte une belle bouse privée d'intérêt. Non, j'exagère, deux intérêts : 1/ Juliette Armanet, excellente, sobre, crédible (surtout face à un Bouillon qui surjoue le charme, qui drague jusqu'à la mamie du 8ème rang, et qui campe un personnage particulièrement crispant) ; et 2/ à mon corps défendant, les parties chantées : on voit bien le côté racoleur à avoir voulu ainsi rassembler toutes les générations de variété française, de Dalida à K.Maro, de Stromae à Nougaro, mais le fait est que par je ne sais quelle magie, dès qu'un acteur se met à chanter, je pleure comme un veau. Ça peut être le pire des navets ou un chef-d’œuvre absolu, je pleure comme un veau. Ici aussi, donc, ce fut chose faite, en me maudissant intérieurement d'être si réceptif à des ficelles aussi énormes. Je reste nonobstant ébahi par le manque d'ambition criant de ce premier film, et toujours consterné de voir les jeunes réalisateurs tout donner pour des films qui semblent dater d'il y a 30 ans, des films tellement privés d'importance, de fièvre, d'envie, de cinéma. (Gols - 22/05/25)
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