Seven de David Fincher - 1995
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Seven n'a pas trop mal vieilli pour un film "culte". Ou disons que j'y ai retrouvé, 30 ans après, ce qui m'avait emballé et ce qui m'avait gavé. La balance s'équilibre à peu près entre défauts et qualités, et au final on passe une petite soirée polar pépère, grâce à l'indéniable habileté du scénario, au sens du rythme de Fincher et à ces ambiances mortifères du plus bel effet. Ce film a été un des pionniers dans le genre 'thriller poisseux" : à l'époque on pouvait encore être frappé de stupeur devant le suprême sadisme de ce tueur en série qui ira jusqu'au bout de son plan sanguinaire avec une astuce assez géniale. Tant de films et de livres se sont engouffrés dans cette brèche du polar violent à surprises à la suite Seven, que celui-ci en paraît aujourd'hui bien innocent, mais tout de même : le dernier quart d'heure continue à être terrassant, et le film va quand même loin dans le machiavélisme. Bon, il est vrai que tout le film semble bâti autour de cette fin géniale, qu'à la sortie on se dit que tout le reste n'a que peu d'importance, et que du coup on soupçonne un peu de ramenardise de la part de Fincher qui construisait ses premiers films autour d'une surprise finale en comblant l'attente avec 1h45 de pas grand-chose avant.
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Ne soyons pas injustes : c'est très distrayant, et Fincher a un incontestable talent pour nous faire patienter avec des scènes parfaitement calibrées. Son univers est glauquissime, très nocturne, très versé vers les bas-fonds sordides, les appartements en friche, les recoins repoussants d'une ville regardée comme un enfer total. Dans cet enfer, les deux personnages de flics, l'un petit con crâneur et binaire, l'autre vieux briscard désabusé mais surdoué, se débattent pour mettre la main sur ce fameux "tueur aux péchés capitaux", sans savoir qu'ils font eux-mêmes partie du plan. Les meurtres, sordides et filmés avec crudité, nous enferment dans une atmosphère à la fois angoissante (ce tueur est presque surhumain) et désespérée : on sent dès le départ que ça ne va pas se terminer joyeusement. Si le scénariste apporte beaucoup de soin aux petits détails (biographie de ses flics, rebondissements de l'enquête), on le suit quand même moins sur les extraordinaires réussites du tueur, qui arrive à prévoir un an à l'avance, à la seconde près, ce que vont faire les enquêteurs (quelle chance il a, ce type) ; si Fincher est habile dans les scènes d'ambiance, on est moins convaincu par ses scènes d'action : le montage de la course-poursuite au centre du film est absolument illisible, et on ne comprend pas non plus grand chose aux mises en scène des crimes ; si Morgan Freeman est plutôt marrant en vieux flic grincheux, on note que Brad Pitt est encore dans sa période "je fais 37 grimaces pour exprimer une seule émotion" (son dernier gros plan est carrément clownesque), et qu'il est particulièrement nul. Bref du pour et du contre, mais on voit bien comment ce film a contribué à marquer un petit tournant dans l'histoire du polar au cinéma. A voir, pour l'Histoire, donc, et pour l'histoire, donc.
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