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12 juin 2025

Julie se tait (Julie zwijgt) (2024) de Leonardo Van Dijl

Julie se tait donc ; et c'est vrai qu'elle se tait, la pauvrette, jeune joueuse de tennis toute concentrée sur son art alors même que son ancien entraineur semble s'être, lui, un peu trop concentré sur elle... On est à l'école des Dardenne (producteur de la chose) mais non pas dans le style caméra à l'épaule qui te suit jusqu'au fond des toilettes mais dans celui, beaucoup plus posé, du plan fixe qui scrute et qui sait filmer les silences. Julie, elle, prise entre ses entrainements et son école, est une jeune fille prometteuse à laquelle on demande simplement une chose après le suicide d'une de ses camarades de jeu  : as-tu quelque chose à dire sur ton entraineur ? Ce dernier est suspendu et semble la jouer blanc comme une ancienne balle de tennis ; on comprend vite qu'il a de la bande (Julie, quand tu m'as dit d'arrêter, j'ai arrêté, hein ?) et que Julie hésite ; mais elle s'enferme dans ce mutisme grave alors qu'un mal (être) évident la ronge de l'intérieur... Elle se focalise sur son jeu, sur ses examens sportifs, sur ses études comme si libérer la parole serait remettre en cause tout un pan de sa vie...

École, disait-on, de la cinématographie d'entomologiste où derrière les balles claquées de plein fouet à la volée, ou derrière les discussions badines entre amis, ou derrière la nouvelle connivence qui s'installe avec le nouvel entraîneur, on devine tout un gouffre de doutes, de solitude, une sorte de puits existentiel... Si jeune, si douée, mais déjà si traumatisée... Pas si facile, malgré les encouragements des adultes, de passer ce cap-là, celui de la parole libérée, pris(e) qu'on fut dans les mailles du filet de ce formateur-tuteur palpeur... Van Dijl, avec ces images qui baignent dans une certaine obscurité, avec ce jeu sur le flou qui danse autour de notre héroïne, concentre son jeu, sa mise en scène sur cet être si solide en apparence mais qui tente au quotidien de refouler ses fêlures. La démonstration n'est jamais trop lourde, le cinéaste ne cherchant jamais à s’appesantir sur cette Julie toujours en mouvement, dans l'action... si elle s'effrite de l'intérieur, la jeune Belge, elle continue de faire bonne figure, de monter au filet comme un métronome... Tiendra le rythme ou pas ? Tiendra sa langue, ou pas ? Un vrai ton, une belle école de la psychologie en douceur, un premier film belge gagnant à défaut d'être un ace.  (Shang - 07/02/25)

 

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Tout est dit, oui. Ce film est d'une rigueur toute janséniste et réussit à dire beaucoup de choses avec très peu d'effets. Van Dijl ne mange pas du pain de la psychologie facile et de l'explication à tout prix : il préfère se la jouer observateur, en l'occurrence du mystère que représente Julie, et laisser le spectateur face à cette béance, et face aux suppositions. Sans manichéisme ni polémique inutile, le metteur en scène montre que les édiles sont maintenant formées pour aider les jeunes filles victimes de violence sexuelle, mais que la parole est toujours aussi difficile à se libérer du côté des victimes. Autour d'elle, les parents, les responsables du club, les amies, le nouvel entraineur, sont tous prêt à l'écouter, à recevoir ses confessions. Mais Julie est enfermée dans son univers, dans son malheur, dans son monde : on ne la voit jamais face à un adversaire sur le court, la caméra reste sur elle pendant ses échanges de balles, comme si elle jouait seule, comme si elle ne trouvait pas le répondant satisfaisant pour se confesser. La caméra rend à merveille l'opacité de ce visage, l'énigme que constitue ce silence ; et la grande idée du film est de se servir du sport, du tennis, pour exprimer la sorte de compensation de Julie : elle contient son malheur par la concentration du sport, et sa rage ne déborde que dans les coups droits qu'elle assène façon bulldozer. Très beau portrait d'une fille seule, incapable de s'exprimer, qui est en fait un beau portrait d'adolescente tout court. Par-delà le thème du harcèlement, on voit de façon très réaliste le portrait d'une jeune fille ordinaire, enfermée dans son monde et dans sa passion. C'est toute la qualité de Julie se tait de transcender son aspect "film à thèse", et de nous montrer au final une fille ordinaire, qui ne sait pas encore exactement comment vivre, quelle attitude adopter face aux adultes, quoi partager de son univers. Dans des scènes d'une mesure impeccable, Van Dijl réalise un film d'une belle honnêteté, pas passionnant de bout en bout (trop répétitif, peut-être, dévoilant ses intentions dès les premières scènes et ne sachant pas vraiment comment les faire évoluer sur 90 minutes), mais juste et touchant.  (Gols - 12/06/25)

 

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