Fotogenico (2024) de Marcia Romano & Benoît Sabatier
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Voilà résolument la bonne nouvelle cinématographique de cette fin d'année : un film aux allures un peu foutraques qui semble définitivement sorti de nulle part (mais les réalisateurs en ont dans les chaussettes aussi bien au niveau technique (rarement vu d'aussi beaux zooms) que musical) et qui ne cesse, sur un thème pourtant un rien tristoune (le deuil d'un père pour sa fille), de nous donner des petits rictus de joie, des sautillements dans les chevilles, des petits coups de latte dans les iris. Marseille, des donzelles aux allures androgynes, du rock, un homme en slip ? Que pourrait-on franchement ajouter d'autres pour vous mettre l'eau à la bouche (du Rhône) ?
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Christophe Paou est Raoul, ancien représentant en côte-roannaise (tout un programme, déjà) : il débarque à Marseille la bouteille de pif au bec. Sa mission première : retrouver les personnes que côtoyait sa fille avant de mourir prématurément (après une fête trop arrosée ?) ; son premier exploit : se baigner dans le port de Marseille, en slobard ; son premier problème : ressortir de l'eau et ne pas retrouver ses affaires ; son deuxième exploit : arpenter les rues marseillaises en slip rouge et trouver une solution vestimentaire adéquate ; son... Le reste est l'avenant, chaque épisode semblant constituer une victoire personnelle... ou une défaite cuisante... Raoul, bras-cassé qui n'a pas froid aux yeux, a l'air débonnaire, mais faut pas trop non plus lui casser les couilles ; il erre, dans ces quartiers marseillais ensoleillés et tagués, vogue de rencontre en rencontre (l'ancienne bande de filles au look plus ou moins masculinisé avec lesquelles, première grosse surprise, sa fille avait fondé un groupe de rock qui dégoupillait : Fotogenico), s'extasie à loisir lorsqu'il découvre le seul disque enregistré par sa progéniture, déchante méchamment lorsqu'il apprend, comprend, la façon dont cette dernière s'est éteinte... On pourrait tomber dans la pathétisme, la dépression, le glauque, mais Raoul et les deux réalisateurs ne mangent pas de ce pain-là et nous livrent une œuvre qui déborde d'énergie, de surprises, de résilience (...) de bout en bout...
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Reconnaissons qu'on est loin de toute ornière cinématographique, qu'on a plus l'impression d'avoir parfois affaire à un film trouvé dans une caisse des eighties tant l'esthétisme général est hors-norme, mais on est bien dans une œuvre les deux pieds dans notre époque : des personnages hauts en couleur qui affirment clairement et fièrement leur camp, des sujets traités frontalement (la drogue, profiteurs et victimes), des thématiques musicalo-littéraires (du groupe de rock au vendeur de drogue qui écrit sa vie en 78 tomes) électriques, radicales. Raoul prend le film sur ses épaules avec l'air de s'en foutre mais nous livre une prestation aussi loufoque que sérieuse d'une intensité évidente. On ressort de ce bazar en ayant l'impression de n'avoir pas vu un film aussi original depuis deux siècles, un peu déboussolé, oui, mais totalement persuadé d'avoir assisté au meilleur film avec un type en slip rouge. Le cinéma demeure un art vivant (au moins à Marseille). J'ai attrapé un coup de soleil, un coup d'amour...
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