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12 novembre 2024

Les Pirates du métro (The Taking of Pelham One Two Three) de Joseph Sargent - 1974

Scié par ce thriller qui ne promettait sur le papier que divertissement démodé et délassement éphémère : il y a dans Les Pirates du métro un savoir-faire impressionnant, c'est à se demander pourquoi Joseph Sargent a eu une aussi piètre carrière. A vrai dire, ce n'est pas que grâce à lui que le film est excellent : c'est la convergence de plein de compétences à tous les postes, et l'adjonction d'un scénario parfait, qui fabrique la magie. Tout est bien : la photo granuleuse immédiatement reconnaissable dès lors que vous vous piquez de filmer New-York dans ces années-là ; la musique jazzy à souhait (David Shire à la baguette) ; le montage parfait, vraie plus-value de la chose, qui alterne avec une extraordinaire fluidité les deux décors/atmosphères filmés, et fait se rencontrer des registres pas forcément copains (thriller et comédie) ; les seconds rôles, qui ont tous leur petite part de truc à jouer, leur petite réplique marquante, leur part du gâteau ; les acteurs géniaux, au jeu bien de leur époque (blagues misogynes comprises), c'est-à-dire compétents et pas ramenards... Que du bien à dire, vraiment.

Comme je l'ai dit, c'est avant tout le scénario qui est bouclé de façon diaboliquement efficace. Dans un huis-clos très angoissant, rompu uniquement par des allers-retours dans le poste de commande du métro new-yorkais, on assiste à un braquage de train. Quatre hommes (qui s'appellent par des noms de couleur, Mr Brown, Mr White, oui, ça rappelle quelque chose) s'emparent en effet d'une rame, avec les otages qui vont avec, et menacent de tuer un otage par minute s'ils n’obtiennent pas une rançon d'un million de dollars. Ils vont négocier à distance avec le lieutenant de police du métro, Garner (Walter Matthau, impeccable). Aussi bien du bon côté du manche (les flics, les otages) que du mauvais (les truands), tous les personnages ont leur personnalité, leur épaisseur. Pourtant le film se désintéresse complètement de leur biographie ; à peine entend-on quelques allusions à leur passé, mais si discrètement amené que ce n'est même pas la peine d'en parler. On est dans le temps présent, en temps réel, et le comportement de chacun est guidé uniquement par la situation. Ce qui n'empêche pas chacun d'avoir son moment de bravoure, son mot à dire. La plus grande qualité du truc, c'est l'alternance entre la comédie franche et le drame qui se mélangent souvent en quelques secondes. Dans ce contexte, les scènes de violence tombent très brutalement, on ne s'y attend vraiment pas.

Ce casse montre une ville rongée par le crime et la violence, complètement lâchée par ses édiles (les scènes avec le maire sont d'une causticité terrible), où les flics sont envoyés comme de la chair à canon au combat, qui a encore tout à devoir au western (les deux flics envoyés dans le tunnel du métro se comparent aux gusses de OK Corral, d'ailleurs), où la vie de la poignée d'otages ne pèse pas bien lourd dans la balance (surtout quand il s'agit de Noirs ou de femmes...), où eux-mêmes semblent assez peu concernés par ce qui leur arrive (une ivrogne dort même pendant tout le braquage). Bref, c'est noir, très noir, mais ça ne sombre jamais dans le désespoir, par ce ton miraculeusement léger qui se dégage de tout ça. Sargent préfère l'action, le suspense, les personnages, au discours, aussi amer soit-il, et nous offre un polar magnifique, divertissant en diable, un trésor de savoir-faire à découvrir de toute urgence.

 

Commentaires
B
Mouais… sympatoche petit polar à papa qui a quand même pris un bon coup dans le crémol. Cette pantouflardise et cette grisaille marronnâtre seventies, ça vous botte tant que ça, dites ?
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