La Folle Histoire de Roxie Hart (Roxie Hart) de William A. Wellman - 1942
Quand votre carrière de danseuse de music-hall décline, quoi de mieux que d'assassiner un type ? C'est ce que dit la pétaradante Roxie Hart, artiste vulgaire et pas finaude de spectacles olé-olé : à la faveur d'un meurtre commis par son (non moins imbécile de) mari, elle décide d'endosser le crime pour relancer sa carrière, sachant que les femmes sont rarement condamnées lourdement pour meurtre. Une fois ce postulat planté, Wellman va s'en donner à cœur joie dans la critique du système judiciaire, des médias, des masses populaires, pointant avec pas mal d'acidité le goût du public pour le sensationnel, la corruption de la justice et l'appel du scandale chez une presse friande de gambettes et de sang. Bon, c'est un petit film, hein, on ne va pas se le cacher, mais un film fort divertissant et qui comporte sa dose de causticité. Le plus du film, c'est Ginger Rogers, pétulante, hystérique, vulgairissime, qui fait une composition vraiment formidable de cette fille ordinaire devenant une véritable escroc au contact des hommes qui manipulent son image. En plus des passages dansés obligatoires, où elle fait bien sûr merveille, il faut la voir aguicher les jurés ou relever sa jupe un peu plus haut qu'il n'est décent pour obtenir les faveurs d'un juge ou d'un gardien de prison : elle fait l'essentiel de la drôlerie et de l'impertinence du film, qui flirte avec les lois de la censure avec un bien bel esprit frondeur. Complètement dépourvue de morale, par sottise plus que par malignité, Roxie se laisse porter par les conseils de son avocat, qui, lui, utilise la morale comme arme de guerre, en pleine conscience. Si bien que le film se teinte d'un peu de profondeur : c'est une femme manipulée par les hommes, et les manipulant en retour, eux par leur cynisme, elle par ses charmes. Elle poussera le bouchon jusqu'à se renier elle-même dès qu'une rivale un peu plus jolie, un peu plus nouvelle, pointera son museau. Le tout se terminera par une tripotée d'enfants, ouf, la morale est sauve quand même. Wellman ne cesse ainsi de défoncer (gentiment) les barrières de la censure puis de rentrer dans le rang, dans un numéro d'équilibriste assez délicieux : on aime rien tant que voir des cinéastes critiquer le système en faisant semblant de lui obéir. Une jolie comédie dynamique et malpolie, moi je dis, on prend.