La Bagarre de Santa Fe (Santa Fe) d'Irving Pichel - 1951
Il peut arriver que dans l'énorme masse du tout-venant du western des 50's, on puisse trouver quelques occasions de satisfaction. On ne retiendra rien de ce Santa Fe anonyme et hyper-conventionnel, il n'apporte strictement rien de nouveau au genre, il frôle même l'ennui dans toute sa partie centrale. Mais on peut quand même y trouver son plaisir, grâce à la modestie de son réalisateur pourtant relativement habile, grâce à de jolies couleurs, grâce à son contexte charmant et intéressant, grâce à notre bon vieux Randolph Scott, qui interprète le héros ordinaire qui a fait sa gloire avec beaucoup de talent. Dans les décombres de l'immédiat après-guerre civile, notre héros interprète un sudiste qui a vu son monde disparaitre et qui tente de se refaire : avec ses frères, il traverse un pays encore très marqué par les rivalités entre les deux camps, à la recherche d'un taff. Mais un soir, alcool, provocations, fierté nationale, boum ils descendent par accident un ex-nordiste trop grande gueule. Si Britt (Scott, donc), décide d'oublier l'incident et de se faire engager dans la compagnie de chemin de fer en plein développement, ses frangins ne sont que rancune et soif de vengeance et partent du mauvais côté de la barrière : d'abord juste gros emmerdeurs, ils deviennent de plus en plus lourds quand ils rallient une bande de hors-la-loi adepte des braquages. On voit alors se dessiner le dilemme moral auquel Britt va devoir faire face : gagner honnêtement sa vie en construisant cette voie de chemin de fer, ou rester fidèle à sa famille et venir en aide à ses délinquants de frères. Pas simple...
Le contexte dans lequel cette petite histoire se déroule (le développement du train, les galères pour construire à travers le pays la voie ferrée) est suffisamment glamour pour qu'on oublie de s'ennuyer. Pichel filme joliment les trains, et c'est un plaisir de gosse de regarder ces jolies locomotives colorées fumer au sein de vastes paysages en Technicolor. Les méandres du scénario sont bien un peu attendus, et les acteurs bien un peu pâlots (cette blonde sous-exploitée n'a aucun charisme, les méchants sont pratiquement absents, les rôles "comiques" sont assez pénibles), mais à la mise en scène, il y a de la compétence. Les scènes d'action notamment sont bien enlevées, surtout cette bagarre finale à bord du train, qui envoie du steak. Et puis Randolph est comme souvent parfait (malgré son chapeau assez hideux) dans le rôle de l'honnête homme, juste et calme mais capable de sortir les guns ou d'user des poings quand il s'agit d'imposer la justice. Son personnage, petit mec ancien héros de guerre mais acceptant la défaite, dévoué désormais au développement du train, contraint de s'opposer à sa famille tout en gérant son taff et sa moralité, lui va comme un gant,et il s'en tire sans éclat mais avec un vrai savoir-faire. Ce qui fait qu'au final, on a là un petit, tout petit western pas si mal troussé, qui passe le temps sans difficulté.