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12 septembre 2024

L'Homme aux mille visages de Sonia Kronlund - 2024

On peut se demander ce qu'une telle production fait au cinéma, tant elle ressemble comme deux gouttes d'eau à un documentaire-télé classique. On peut aussi se demander s'il était bien utile  de donner ce prolongement au livre raté de la même auteure (et au même mauvais titre) sorti cette année. Eh bien si la première question reste un peu sans réponse, à la seconde on est en droit de répondre : oui, c'était utile, puisque le film réussit là où le livre avait échoué. Notamment dans la façon qu'a Kronlund d'utiliser le réel pour fabriquer une histoire, avec ses rebondissements, ses personnages forts, ses vastes mouvements. Loin de se concentrer sur son seul "héros" (un homme qui a manipulé un nombre effarant de femmes, les épousant, leur mentant avec un aplomb terrible, menant de front plusieurs vies dans plusieurs pays sous plusieurs identités, un vrai génie de l'escroquerie et de la mythomanie), elle donne toute leur place à cette poignée de femmes trahies (dont certaines sont interprétées par des comédiennes), celle-ci encore chargée de haine, celle-là se souvenant de ça presque avec des restes d'amour, cette autre ayant tourné la page et prête à reconnaître l'invention du gars. Chacune avec sa personnalité témoigne d'une posture vis-à-vis de cet effarant prédateur, et le film dresse d'abord des portraits de femmes bafouées, humiliées... tournant peu à peu à l'essai sur la solitude contemporaine. Ces femmes étaient à la recherche effrénée du prince charmant exotique, riche, beau, cultivé ; et celui-ci, par ses mensonges qu'on a du mal à expliquer (il n'en tirait qu'un profit, disons, amoureux ou sexuel), est aussi un être ambigu, un petit gars de la balle en mal de reconnaissance et d'amour, par-delà sa nocivité.

C'est pourtant avec légèreté que Kronlund aborde le sujet. Bardée d'un humour solide et d'une audace qui ne transparaissait pas dans le livre, elle mène une enquête façon "Faites entrer l'accusé" mais avec ses petites méthodes du dimanche (plan accroché au mur et détective privé façon Bogart à l'appui). Elle ne cache rien de l'amateurisme de ses méthodes d'investigation, des coups de poker auxquels elle se livre (montrer ou pas le visage de cet homme, quitte à essuyer un procès ?), et donne par ce côté dilettante un visage très humain à son film. Beaucoup mieux construite qu'à l'écrit, son enquête prend des chemins de traverse tout en restant concentrée sur son sujet, et ménage son lot de rebondissement, dont le moindre n'est pas la possible rencontre avec le protagoniste de toute cette histoire. Sans dévoiler la fin, excellente, disons que Kronlund y trouve place pour exercer une sororité taquine, pour venger ces femmes et pour se foutre ouvertement de la gueule de ce don Juan pathétique. Finalement, L'Homme aux mille visages est un beau film consolateur et tendre, jamais juge ou agressif, passionnant et intelligent.

 

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