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16 août 2024

SERIE : Le Monde de demain de Katell Quillévéré, Hélier Cisterne & David Elkaïm - 2022

Une petite série télé, ça se perd ces temps-ci sur Shangols. Celle-ci vous redonne foi dans le genre, et prouve que les séries ne sont pas que d'efficaces productions normées, mais peuvent aussi dispenser pédagogie, intelligence et sensibilité avec finesse. Le Monde de demain raconte une période précise de l'Histoire de la musique en France, et avec elle raconte quelque chose de l'époque, comme une sorte d'histoire de la liberté contemporaine. Pas moins. Nous sommes en effet dans les années 80, effervescente période ayant vu se développer radios libres, culture hip-hop et street-art, sous l'influence de la gauche nouvellement au pouvoir et d'une jeunesse héritière de 68. On suit en particulier 4 personnages que les créateurs ont voulus emblématiques de ce mouvement contestataire. Didier Morville et Bruno Lopes découvrent fascinés la danse hip-hop, et vont peu à peu inventer un rap à la française, ancré dans la rue, fier et rebelle : ce sera NTM, dont la série raconte l'existence avec amour et précision ; Daniel est un brave garçon un peu geek découvre de son côté la musique électro, le scratch, et gravit les échelons de l'animation radio et des pistes de danse : ce sera DJ Dee-Nasty ; Virginie, enfin, est une danseuse et graffeuse qui tient à trouver la place de sa féminité dans ce monde masculin et à imposer sa griffe : ce sera LadyV, partie la moins intéressante de la série en ce qu'on sent bien que ce personnage est l'alibi féministe du truc, mais ne tient pas dans cette histoire masculine, qui s'est faite sans les femmes.

Il faut avant tout citer les acteurs, qui sont exceptionnels et dirigés avec beaucoup de finesse : Anthony Bajon est toujours aussi intense et toujours aussi modeste dans son jeu, et campe un Kool Shen pugnace, très sûr de lui ; Melvin Boomer en Joey Starr parvient à être aussi flamboyant que son modèle (et aussi énervant), on sent qu'il y a de la graine de star ; et Andranic Manet (vu aussi dans Le Roman de Jim), avec sa tête de Jacques Brel halluciné, est lui aussi génial en garçon pas si sage, joyeux, accroché à son rêve. A côté d'eux, les autres jeunes acteurs (re)créent un monde hyper cohérent, on croit à chaque petit personnage, à chaque événement, à chaque détail de reconstitution. Il faut dire que les auteurs documentent l'époque avec une précision effarante, en évitant toujours le folklore ou l'artifice, en distillant avec mesure les infos historiques, en restant toujours du côté de leur personnage et en montrant l'Histoire à travers eux. Dynamique, fun, passionnante, la série vous replonge les deux pieds en avant dans cette époque de liberté où ni plus ni moins qu'une culture a été inventée. On a l'impression que tout y est traité, non seulement la petite histoire (les relations avec les filles, avec les autres bandes, avec les parents, le quotidien ardu des gars issus de banlieue dans les milieux parisiens branchés, les dents longues des producteurs, l'ascension difficile du groupe entravé par les caprices de Joey Starr, les renoncements, les doutes, les coups d'éclat, la débrouille, les audaces, les trahisons...) mais aussi la grande (les radios libres représentées par la mythique Carbone 14, l'aspect libertaire de l'époque, la culture de rue...), on a l'impression de faire le tour de ce qu'il y a à dire sur le sujet. Le montage, qui voyage agréablement entre les différents personnages, la musique forcément au taquet, la mise en scène fiévreuse et moderne, la direction d'acteurs exemplaire, tout participe à la grandeur de ce film. On pourra dire que j'ai aimé une œuvre de Katell Quillévéré.

 

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