Dolando de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub – 2002
Il y a encore des films farceurs de Straub et Huillet qui avaient échappé à notre vigilance, les coquins. Comme ce Dolando, tiens, joyeux court-métrage nous présentant à l'épure un extrait du fameux et incontournable Gerusalemme liberata du Tasse. Toujours aussi récréatif, le couple infernal copie-colle sa méthode éprouvée depuis bien longtemps maintenant sur ce film : un acteur raide comme un piquet, décadré dans un coin, derrière lui la nature, plan fixe à l’exception du dernier qui panote sur le paysage, son concentré sur la voix autant que sur les souffles du vent dans les arbres, et envoyez : un nouvel exemple du goût du duo pour l'ascèse, le texte-rien-que-le-texte et la parole implantée dans un territoire précis. Petit changement cette fois-ci : le texte n'est pas vraiment dit, mais ”clamé”, presque chanté par un acteur toscan, visiblement dans la grande tradition de la région. Il s'agit du récit d'une bataille sanglante, bon, on s'en fout un peu, tant on reste concentré sur cette voix et ces sons, cette verdure éclatante et cette forme épurée. On reconnait un Straub-Huillet à 3 km, non seulement par ces choix esthétiques forts, mais aussi, il faut bien le dire, par l'ennui qui nous guette dès la 15ème seconde. Il s'en foutent : ils restent complètement amoureux des textes, continuent d'inventer jusqu'au bout une méthode bien à eux pour les faire entendre, et perfectionnent l'austérité de leur cinéma, à rebours de tout ce qui se fait dans ce domaine. Rien que pour ça, on ne peut qu'éprouver un profond respect pour les bougres.
Tout Straub et tout Huillet, ô douleur : cliquez