Le journal intime de Lolita entre ses 12 et 17 ans imaginé par Christophe Tison... Une façon d'étaler des propos salace sur celle sur laquelle s'étalait le pervers Humbert Humbert ? Si Tison, lui-même maltraité sexuellement dans son plus jeune âge, revient sur les premiers épisodes sexuels de la vie de la pauvre Dolorès, c'est bien sûr avant tout pour empathie envers cette jeune femme manipulée et abusée à la sortie de l’œuf. Bienheureusement, le livre quitte vite les sentiers de la pédophilie ordinaire pour se focaliser sur cette jeune femme en quête de repères : sans mère, la pauvre Lolita ne sait à quel saint se vouer pour retrouver un minimum de dignité et d’affection... Elle tentera de se défaire rapidement des griffes de l'Humbert pour souvent retomber dans celles de parents peu aimables ou d'autres pervers acoquinés avec les milieux du cinéma... Il y aura bien quelques tentatives amoureuses avec des jeunes hommes mais la malédiction planera jusqu'au bout dans ses rapports avec les hommes, plus destructeurs que véritablement constructifs... Tison tente de retrouver le ton timide et maladroit d'une jeune adolescente américaine (avec aussi, de son côté, une certaine maladresse : un jeu de mot en français sonnant forcément feu dans ce journal censé être traduit de l'anglais... petit détail mais tout de même) et tente autant que faire ce peut de prolonger le plaisir (littéraire) du culte roman de Nabokov. S'il ne se marave point dans des passages sexuels déplacés, s'il tente avec une certaine agilité de traduire les tourments de cette adolescente toujours curieuse, toujours partante, jamais abattue, il faut reconnaître que ce journal intime tourne aussi un peu en rond. Lolita semble condamnée d'avance à tomber dans les rets des avances mâles, comme si elle ne pouvait se défaire de cette image d’objet sexuel ; ces multiples tentatives pour tracer seule sa route tourne un peu trop rapidement à l'échec et, malgré le ton léger de la jeune fille qui ne cherche point à s’apitoyer sur son sort, son humour même, l'ouvrage s'avère quelque peu répétitif. Au final, une tentative très casse-gueule sur le papier qui ne tombe point dans l'ornière facile de la sexualité impudique et perverse mais qui ouvre finalement assez peu de perspective pour cette "héroïne malgré elle" condamnée à subir les bas instincts masculins. L'intimité d'un personnage devenu mythique traité, en quelque sorte, de façon un peu trop timide...

LIVRE : Le Journal de L. (1947-1952) de Christophe Tison - 2019

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