Milou en Mai (1990) de Louis Malle

Un Louis Malle d'un autre âge, un film pour ma grand-mère, une œuvre très classique au niveau du point de départ (la mort de l'ancêtre qui va permettre la réunion de toute la famille) mais qui va tenter (on est en mai 1968) de se faire un peu coquine, un peu libertaire avant de retomber lourdement sur ses pieds. C'est vraiment le genre de film qui ne mange pas de pain avec toutes les scènes imposées (les retrouvailles, la lecture du testament, le partage des meubles et de l'argenterie, les disputes autour des bijoux de famille, le déjeuner champêtre sur l'herbe...), avec tous les personnages stéréotypés qui vont avec (Piccoli l'oisif bon viveur, Duchaussoy le stressé politisé, Carette le camionneur décomplexé, Miou-Miou la bourgeoise profiteuse, Blanc la lesbienne mal-aimée et incomprise...) et une trame honteusement prévisible : alors même qu'un vent de folie souffle sur la Bohème et sur Paris et sur la France, notre petite famille du Gers va en faire les frais ; les langues se libèrent, les couples se défont et se refont (chacun fait fait fait, ce qui lui plaît), chacun y va de son petit couplet idéaliste ou ultra-conservateur tout en se laissant aller (en rêve ou en réalité)  sur une petite pente douce sexuelle... qui n'aura guère de graves conséquences (un seul couple déjà bien brinquebalant (les lesbiennes, of course) en fera les frais).

Un petit vent de révolte qui sera surtout pour la galerie car au premier petit soupçon de danger, toute la famille prendra lâchement la fuite - un fiasco risible : sont beaux-parleurs, ces bourgeois, mais la peur prend vite le pas sur ce joli courage de façade... Un petit film qui a le goût de la mie un peu rassise mais qui permet à tout un chacun de faire montre de son petit grivois bien gaulois (les regards appuyés et les réflexions sur la gamine passeraient moins bien aujourd'hui, m'est avis... bref). C'est du film français pépère qui bénéficie au moins d'une belle image et qui nous permet d'apprécier encore et toujours l'ami Piccoli dans un rôle en roue libre et, une fois n'est pas coutume, l'ami Carette (dont la carrière se terminera prématurément - bien dommage, il endosse ce personnage ingrat de Français moyen bien vulgos à la perfection). Ça sent la naphtaline et les valises en carton dans tous les coins... Notons tout de même qu'il s'agit là d'un film où Louis Malle, doucettement moqueur, ne fait que s'amuser gentiment des éternels petits travers de nos concitoyens français : on se rêve idéaliste mais on finit toujours par se complaire dans un conservatisme rance. Pas bien méchant.

De Malle en pis

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