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1 juin 2023

Parfum de femme (Profumo di donna) de Dino Risi - 1974

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Ah tiens, un classique italien qui n'était point encore dans nos colonnes. Entrée officielle donc en ce jour de Fausto Consolo, ex-joli cœur militaire, hâbleur et autoritaire, volubile et colérique, aujourd'hui rendu aveugle et vieillissant. En plein déni de handicap, très titilleux sur la compassion qu'il pourrait déclencher chez les gens, il tient à mener encore la vie de flambeur d'autrefois, à tomber des belles femmes et savourer les meilleurs vins du pays. Il engage un jeune aide un peu niais, Ciccio, et part pour Naples, y accomplir un acte dont je vous laisse savourer la surprise. Entièrement centré sur ce personnage fabuleux, rabelaisien et agressif, qui sent la présence des femmes par leur parfum, le film est un road-movie assez tonitruant... mais qui cache derrière la comédie (on connait Risi) des tonnes de tristesse. Le fait qu'il se concentre sur Fausto n'occulte en rien les personnages secondaires, qui sont génialement dessinés : Ciccio, un gosse pas dégrossi qui se montrera au final pas aussi con qu'on le voulait ; et Agostina, un rêve de petite nana dévouée et jolie, folle amoureuse de Fausto, qui la rejette, écœuré par sa tendresse, lui préférant les teupu de bas étage qu'il croise sur sa route.

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Parfum de femme est une merveille de sensibilité et de pudeur, à l'image de son personnage principal, campé par un Vittorio Gassman en sur-forme. Ça prend des airs d'opéra, ça hurle et ça s'engueule à chaque ligne de dialogue, ça s'assène des claques et ça se saoule comme des veaux, mais tout ça est au service d'une sensibilité extraordinaire, et d'un mélodrame qui ne dira enfin son nom que dans la toute dernière bobine, poignante. Fausto est un paquet de déni et de névroses, mais sa sensibilité, qui éclate au contact de la douce Agostina, est bien là, et Risi la laisse éclater avec une humanité à laquelle il ne nous avait pas forcément habitués. Il faut dire que Gassman est au-delà du génie ce coup-ci, parvenant à placer dans son regard vide quelque chose de fabuleusement tragique, aussi à l'aise dans les tonitruantes scènes de comédie que dans le secret de sa décrépitude. Un prix d'interprétation à Cannes pas usurpé pour la coup. Il est question là-dedans de la disparition d'une certaine catégorie d'hommes, macho et grande gueule, représentée par le pathétique et grandiose Fausto, déjà à moitié dans la tombe. Il est question de mort donc, et la photo du film, gentiment morbide avec ses couleurs glauques qui rompent brutalement avec une palette beaucoup plus douce, est tout à fait dans cette veine. Il est question aussi du remplacement de cette ancienne génération par une nouvelle, qui assume enfin ses faiblesses et ses sentiments : Ciccio est touchant à mort, sans jamais tomber dans l'angélisme, nigaud qui va découvrir au contact de ce veux briscard l'amour, le respect de soi-même, la beauté des femmes et le tragique de la vie. Un film qui vous fait marrer et pleurer comme un veau, pas si fréquent que ça. Bref, un grand film.

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