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6 novembre 2022

Time to Love (Sevmek Zamani) (1966) de Metin Erksan

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Qui peut se vanter honnêtement d'avoir déjà vu un film de Metin Erksan ? En toute humilité, again, j'ai envie dire "moi", ayant d'ailleurs été charmé par ce film d'amour réalisé trois ans auparavant, Un Eté sans Eau. De l'eau cette fois-ci il y aura, on ne peut pas dire le contraire, puisque l'élément liquide est essentiel à cette œuvre : des trombes d'eau qui tombent sur cette île turque à cette mer dans laquelle se perdent continuellement le regard des protagonistes, on peut dire sans ambages qu'on assiste là, et je ne parle même pas des pleurs, à un film à l'humidité évidente. Et de l'amour, on en a de l'amour ? J'allais dire oui, bien sûr, en tout cas au niveau platonique, pour ne pas dire métaphysique, si si, à défaut d'être au niveau purement physique... De quoi s'agit-il donc ici ? Tout simplement d'un peintre qui, en retapant une maison, est tombé amoureux dingue d'une photo d'une femme. Ah. A tel point que l'homme, tous les jours, revient dans cette maison inhabitée - il est sur une île, la propriétaire réside à Istanbul... Le film débute quand survient cette femme en villégiature avec deux de ses amies, femme qui surprend notre homme dans son salon... Comment pensez-vous que notre homme réagit ? Quand il la voit, il ne peut se détacher... de cette photo... Quand elle vient vers lui de manière engageante, idem. Quand elle finit par lui offrir la photo, toujours pareil... Quand elle lui dit, fusil, qu'elle l'aime, rien, à peine une hésitation, cette photo d'elle, c'est encore ce qu'il préfère... Parce que voilà, cet amour qu'il a mis dans ce portrait, l'affection et l'attention qu'il met dans ce regard photographié qui le fixe, il est infini à ses yeux, immarcescible, dirait même le prof de musique de notre collège. Bref, pourquoi vouloir aimer simplement une femme quand on sait qu'un jour, hein, l'amour, ben il s'use, il peut se montrer, même, décevant... Pourquoi s'emmerder avec cela alors même qu'il est persuadé que rien ne pourra détruire ce lien unique entre lui et cette photo ? Comment lui donner tort, en un sens ? Elle revient vers lui, constamment, avec affection, avec attention, mais pourra-t-elle le faire flancher ?

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C'est un film, jusqu'au bout (dernière scène d'une terrible beauté), qui questionne avec intelligence la passion amoureuse... Quand on est certain d'aimer l'autre (même son simple "reflet") plus que tout, pourquoi vouloir chercher à consommer la chose, pourquoi vouloir risquer, forcément, un jour, d'être déçu ?... C'est une démarche pour le moins jusqu'au-boutiste que met en scène l'ami Erksan dans un film de plus en plus taiseux, de plus en plus en plus mélodique, de plus en plus métaphorique... J'en entends déjà dire certain "donc un peu chiant"... Mouais, mais pas que... Comment exprimer une passion infinie ? En laissant planer le regard du héros, quand il n'est pas en direction de la photo, vers l'horizon alors même que la mer se confond avec les nuages ? Comment exprimer l'envie qu'on a d'un être ? En laissant planer le regard de l'héroïne vers l'horizon alors même que la mer se confond avec les nuages ? Ce sont des pistes, des possibilités... Alors oui, il faut bien reconnaître que c'est un film terriblement pluvieux, que c'est un film surtout où les regards se perdent constamment au loin, que c'est un film où les êtres, souvent, errent en chemin, mais comment traduire autrement cette passion qui reste absolue tant qu'elle n'est pas "réalisée" ? La fin, disait-on, définitivement très belle, éminemment poétique (et tragique ?), (Gols me fait les gros yeux : promis, je ne dis rien, ça va) évoque intelligemment ce dilemme : sans cet idéalisme forcené, pourrait-on tout de même parvenir à goûter cet amour ? Je ne réponds point, Erksan le fait avec joliesse. A new turkish delight, as they say - mais humide. Et délicieusement sad.

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